LXXIII. - L'humilité est la parure de la Divinité.
D'elle s'est revêtu le Verbe fait chair, à travers le corps
duquel elle est devenue nôtre. Quiconque s'en revêt réellement
s'assimile à Celui qui est descendu de sa splendeur, en recouvrant
sa gloire d'humilité, afin que la création ne fut point
consumée par sa vue trop manifeste.
LXXIV. - Quand
l'homme d'humilité s'approche des bêtes sauvages, à
peine l'ont-elles considéré que leur nature féroce
se dompte : elles s'avancent vers lui comme vers leur maître,
baissent la tête, lèchent ses mains et ses pieds, car
elles sentent, émanant de lui, le même parfum que celui
d'Adam avant la chute.
LXXV. - Quiconque
trouve ses péchés insignifiants en commet de pires :
il subira un septuple châtiment.
LXXVI. - Quiconque
endure avec humilité les accusations dont il est victime a
atteint la perfection, et les saints Anges le considèrent avec
un étonnement admiratif. Il n'est point d'autre vertu aussi
élevée et aussi difficile.
LXXVII. - Ceux
en lesquels le monde est mort supportent joyeusement les offenses
; loin de pouvoir le faire, ceux en lesquels le monde vit, s'irritent
dans le désordre de leur âme causé par la vanité,
et se laissent envahir soit par le trouble, soit par l'affliction.
LXXVIII. - Aime
les pécheurs, en haïssant leurs oeuvres.
LXXIX. - N'irrite
personne, ne hais personne, pas plus pour la foi que pour les mauvaises
oeuvres. Si tu veux amener ton prochain à la vérité,
afflige-toi à son sujet et en versant quelques larmes, dis-lui
une ou deux paroles affectueuses, évite que la colère
ne t'enflamme contre lui, que jamais il ne voit en toi un signe d'hostilité.
Car l'amour vrai ne sait ni s'irriter, ni s'aigrir, ni montrer de
la passion dans ses reproches.
LXXX. - L'ami de ton salut ne permet à personne de t'approcher
en vain, s'il ne voit que sa présence peut t'être de
quelque utilité.
LXXXI. - La mère
qui apprend à marcher à son fils s'éloigne de
lui, l'invite à venir vers elle ; mais lorsque, dans cette
tentative, il chancelle et tombe, vu la faiblesse de son jeune âge,
alors elle accourt et le prend dans ses bras. Ainsi la grâce
divine porte et instruit les hommes dont le coeur simple et pur s'est
livré aux mains de leur Créateur.
LXXXII. - Ne tente
point dans la poignée de ta main, de retenir le vent, c'est-à-dire
la foi, lorsque les oeuvres font défaut.
LXXXIII. - Je
t'en conjure par toute mon affection de te garder des attaques de
l'ennemi : il pourrait profiter de l'esprit subtil de tes discours
pour refroidir dans ton âme l'ardeur de ton amour envers le
Christ, qui pour ton salut a goûté le fiel sur l'arbre
de la Croix.
LXXXIV. - Seigneur Jésus-Christ, notre Dieu, toi qui, sur la
dépouille de Lazare, versas des larmes d'affliction et de pitié,
reçois les larmes de mon amertume. Par ta Passion, guéris
mes passions par tes plaies, porte remède à mes plaies
; par ton sang, purifie mon sang et unis à mon corps le parfum
de ton corps donateur de vie.