SENTENCES
Saint Isaac le Syrien
XXXVII à XLVIII

XXXVII. - Qu'est-ce que le " monde " ? Comment en avons-nous connaissance et en quoi nuit-il à ceux qui s'y attachent ? Le monde est une femme de mauvaise vie attirant à elle les hommes qui la considèrent avec le désir de sa beauté. Celui pris - ne fût-ce que partiellement -par le goût du monde, qui en est captivé, ne peut s'échapper de ses chaînes qu'en perdant la vie. Lorsque le monde l'aura dépouillé de tout, et, au jour de la mort, l'aura emporté de sa maison, cet homme comprendra réellement le mensonge et la tromperie du monde.

Quand tu entends parler d'éloignement du monde, d'abandon du monde, de la nécessité de s'épurer de tout ce qui est dans le monde, - il te faut d'abord comprendre, non point selon les conceptions de la terre, mais selon celles de la raison réelle, le vrai sens de ce mot : le monde ; alors tu seras à même de savoir à quel point ton âme est éloignée du monde, et dans quelle mesure elle y demeure attachée. Le mot monde est un mot collectif, qui englobe ce qu'on appelle les passions. L'homme qui n'a pas su ce qu'est le monde ne pourra savoir par quels côtés de sa personne il s'en est écarté, et par quels autres il lui est lié. Nombreux sont ceux dont deux ou trois membres ont renié le contact avec le monde, et qui croient que leur vie lui est devenue étrangère ;ils ne peuvent comprendre que le reste de leur corps vit dans le monde. D'après les recherches de l'esprit, le "monde" peut être considéré comme un collectif, englobant les passions séparées. Nous leur donnons, en effet, le nom de monde quand nous voulons les désigner toutes ensemble, et celui de passions s'il s'agit de les distinguer. Elles constituent les diverses parties de la tendance prédominante dans le monde, et lorsqu'elles cessent, cette tendance aussi connaît son point d'arrêt. Voici quelles sont ces passions : l'attachement aux richesses, le désir d'amasser, la jouissance du corps qui engendre l'intempérance de la chair ; l'aspiration aux honneurs, d'où découle l'envie-, celle qui vise à commander; l'arrogance due à l'éclat du pouvoir; le goût de se parer et de plaire; la recherche de la gloire humaine, cause des rancunes ; la crainte corporelle... Là où se brise le cours de ces passions, on voit périr le monde. Vois quels sont ceux de ces membres dont tu vis, et tu sauras pour lequel tu es mort au monde. Quand tu auras connu ce qu'est le monde, toutes ces distinctions te permettront de déterminer en quoi tu y demeures attaché, et dans quelle mesure tu t'en es libéré. Pour résumer, le monde est la vie de la chair et la sagesse charnelle.

XXXVIII. - N'est pas pur en esprit celui qui ignore le mal (il s'assimilerait à l'animal), ni celui dont la nature est à l'état de la première enfance, ni celui qui adopte l'aspect seul de la pureté. Pour être pur en esprit, il faut avoir l'illumination divine, que l'on atteint par l'exercice actif des vertus.

XXXIX. - Ne prennent pas seulement rang de martyrs ceux qui sont morts pour la foi chrétienne, mais ceux aussi qui meurent pour l'observation des commandements du Christ.

XL. - L'homme qui abandonne les oeuvres accroissant la vertu se voit abandonné par celles qui en constituent la sauvegarde.

XLI. - Les larmes dans la prière constituent un signe révélant que la prière est acceptée et guidée dans le champ de la pureté.

XLII. - A la ruine de ce siècle succédera sans transition le siècle futur.

XLIII. - Qu'est-ce que la connaissance ? C'est la vie immortelle, c'est-à-dire la sensation de Dieu. L'amour pur dérive de la connaissance de Dieu, elle-même reine de tous les désirs : pour le cœur qui la reçoit, toute joie terrestre est superflue. Aucune douceur n'est comparable à celle qui révèle Dieu.

XLIV. - Un amour d'origine matérielle ressemble à une faible flamme, nourrie par l'huile qui soutient sa lumière, ou encore à un ruisselet alimenté par les pluies et desséché dès que le ciel en devient avare ; mais l'amour issu de Dieu est comparable à une source jaillissant de la terre, dont les flots ne tarissent jamais, dont l'essence même ne peut s'appauvrir.

XLV. - La vie de ce monde peut être représentée par un nombre limité de lettres, extraites de celles qu'on a tracées sur un tableau: quiconque le désire peut en ajouter, en supprimer, en échanger ; la vie future serait figurée par un manuscrit, tracé sur un rouleau intact, scellé du sceau royal où rien ne pourrait être ajouté ou retranché.

XLVI. - La prière nous amène à rechercher les raisons d'aimer Dieu.

XLVII. - Un Père de l'Eglise s'est fort bien exprimé en disant que, pour le croyant, l'amour envers Dieu serait une consolation suffisante, même dans le cas de la perte de l'âme.
XLVIII. - Voici, mon frère, un commandement que je te donne: que la miséricorde l'emporte toujours dans ta balance, jusqu'au moment où tu sentiras en toi-même la miséricorde que Dieu éprouve envers le monde.


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