II.
EN LA PRESENCE DE DIEU
Prétextes
pour échapper à la prière
La
chair de l'homme convoite contre son esprit.
Elle
ne peut trouver son repos dans la prière, surtout la prière
sincère, pure, offerte en esprit d'adoration véritable,
car celle-ci implique le reniement de soi et la mort des passions,
des convoitises et des fausses espérances...
Aussi le corps invente-t-il mille prétextes pour échapper
à la prière: il prétend être malade,
défaillant, avoir mal à la tête, aux articulations,
au dos, voir grand besoin de dormir.
Si
pourtant l'homme s'oblige à prier, le corps essaie d'abréger
la prière.
Si
l'homme persévère à vouloir accomplir la prière
jusqu'au bout, le corps essaie alors d'échapper au sens des
mots: la langue s'embrouille, l'attention se relâche et divague
par-ci ou par-là, la pensée l'appesantit.
Le
" moi " prend prétexte du corps pour échapper
aux paroles de la prière, car elles impliquent sa mort.
Il
ressemble au serpent qui échappe à la musique du charmeur
et s'empresse de se boucher les oreilles pour ne pas entendre sa
voix, sachant qu'elle implique sa mort.
Cela, le Seigneur le sait; aussi a-t-il recommandé de "
prier toujours sans jamais se lasser " (Luc 18, 1)
Ces graves symptômes n'apparaissent pas dans les prières
pharisaïques, froides, accomplies pour recevoir la récompense
des hommes, c'est-à-dire pour attirer leurs louanges ou leur
admiration.
Au
contraire, le corps s'accommode bien d'une telle prière;
il se lève tôt pour l'accomplir publiquement et n'éprouve
aucune fatigue à se tenir debout de longues heures devant
les hommes.
Il
élève la voix bien haut; intelligence devient très
attentive et lui fait prononcer les prières avec la contenance
voulue, une netteté et une précision qui lui attirent
l'admiration des assistants.
Ce
genre de prière est agréable au " moi
" humain, car il comporte en lui-même une récompense
charnelle: il mène à l'affirmation de soi au lieu
du renoncement à soi, à la déification de soi
au lieu de la mort à soi.
Aussi
le " moi " s'y complaît comme il aime amasser l'argent.
Le
corps ne s'en lasse jamais comme il ne se lasse point d'une bonne
nourriture.
Sachant bien ce qu'il y a dans l'homme, le Seigneur a prévenu
cela en disant: (Matth 6,6) "Pour
toi, quand tu pries, retire-toi dans ta chambre, ferme sur toi la
porte, et prie ton Père qui est là, dans le secret
. "
Ici, fermer la porte indique la nécessité de faire
en sorte que la prière ne soit ni vue ni entendue des hommes,
au moins dans l'intention et la conscience de celui qui prie.
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