Pacôme,
dont le nom signifie « ce grand aigle » 1, naît en
292 en Haute Egypte, de parents païens ; militaire, il découvre
lors d'une campagne la charité des chrétiens de Thèbes
et promet : « Je servirai le genre humain tous les jours de ma
vie ».
Il quitte l'armée et reçoit le baptême.
Sa
reconnaissance envers la communauté chrétienne le mène,
après une période de vie érémétique
auprès de l'ascète Palamon, à devenir peu à
peu « l'inventeur » du cénobitisme, c'est-à-dire
de la vie monastique communautaire, et un fondateur prolifique.
Cette
orientation correspond profondément au caractère de la
spiritualité de Pacôme : le service de Dieu et celui des
hommes.
Il
meurt le 9 mai 347, après avoir accompli une oeuvre considérable
en donnant au monachisme chrétien une forme et un élan
qui se perpétuent jusqu'à nos jours.
Pacôme place la « pratique » au premier plan, car,
mieux que les livres, elle permet de transmettre et d'enseigner.
Si
donc la Vie de Pacôme est une source plus sûre de spiritualité
que ses Règles, celles-ci sont néanmoins importantes,
comme moyen de salut et loi de liberté.
Pacôme
est en effet à l'origine du premier code cénobitique connu,
les Pracepta qui lui sont globalement attribuées et les Règlements
de son fils spirituel et successeur Horsièse.
Par
ces règles, le cénobitisme propose une uniformité
de vie et de cadre qui garantit la solidarité intérieure
et extérieure, tandis que l'obéissance, liée à
l'observance de la règle, devient la forme cénobitique
de l'humilité.
La
désappropriation (aucun objet n'appartient en propre au moine)
est un élément nouveau par rapport à la vie anachorétique
2.
Les
rythmes de vie et de prière équilibrent solitude et vie
communautaire ; l'exégèse s'appuie non sur des principes
abstraits mais sur des exemples vécus.
Obéissance
et observance se retrouvent aussi dans la structure de la communauté
qui met en oeuvre toute une pédagogie : la koïnonia, c'est-à-dire
l'ensemble de la communauté, se compose de couvents, eux-mêmes
répartis en maisons ; à chaque niveau, un responsable
prend le relais du père spirituel.
Cette
remarquable organisation ne fut reconnue officiellement que lors du
concile de Chalcédoine en 451 3.
L'ICÔNE
Pacôme
est d'abord ascète et moine ; vêtu de l'habit monastique
4, il occupe le centre d'un monde qui s'organise et s'équilibre
autour de lui : sous ses pieds, les petits rectangles de terre aux couleurs
variées formant une mosaïque harmonieuse évoquent
la multiplicité des moines et monastères, dont l'organisation
et l'ordre sont l'oeuvre de Pacôme ; derrière lui, les
échafaudages réguliers permettent l'édification
des bâtiments monastiques, et la ferme évoquée sur
la droite garantit au monastère l'indépendance économique.
Pacôme
tient solidement en main les outils de son oeuvre de bâtisseur
: le compas et l'équerre de l'architecte, la règle monastique
du père spirituel.
Sa
silhouette trapue, son visage énergique, intelligent et lumineux
traduisent la force de l'Esprit qui l'habite et le guide dans la réalisation
de sa mission : homme de Dieu, Pacôme est lui-même l'instrument
privilégié et le chef-d'oeuvre de l'Esprit Saint.
«
Nous honorons sans cesse Abba Pacôme, le père du
cénobitisme [...],
qui a quitté l'armée pour suivre Jésus. [...]
Les moines de tous les pays se réjouissent ouvertement en toi,
te glorifient
et te proclament bienheureux, ô Abba Pacôme le Cénobite.
» Livre V, pp. 130-144.
1.
Ou « le faucon du roi » : cf. Vincent DESPREZ, « Le
cénobitisme pacômien », LMC, n° 21-22, pp. 35-43,
avec une bibliographie.
2. Vie des moines solitaires, dont Paul l'Ermite et Antoine le Grand
sont les prototypes.
3. Notice composée par M.-G. de BONCOURT. Icônes de Pacôme
: ATALLA, Icônes, p. 79 ; LEROY, Ouadi-Natroun, pl. 73-74, 98
; VAN MOORSEL, Saint-Antoine I, pl. 65.
4. La symbolique de cet habit est expliquée pour l'icône
de saint Antoine