LA VIE AUX CELLULES
AVEC MACAIRE, EVAGRE ET
TOUS LES AUTRES
1. LA FONDATION
DES CELLULES
(Récit très probablement historique
aux dires d’A. Guillaumont, cf. Apophtegme alphabétique 34).
Antoine le Grand partit un jour visiter
son ami Amoun à Nitrie. Amoun lui confia que le grand nombre de moines
maintenant établis en ce désert nuisait au recueillement et que certains
d’entre eux envisageaient de construire des cellules du côté du désert
: côté sud, car au nord, il y a le village, à l’est et à l’ouest des
cultures. La seule issue possible est donc bien le sud, le désert! Mais
où dans le désert? demande Amoun à Antoine, à quelle distance de Nitrie?
En guise de réponse, Antoine proposa à son ami de partir tous les deux
après le repas (qui a lieu à la neuvième heure) et de marcher droit
devant eux dans le désert jusqu’à la tombée de la nuit. Ce qui fut dit
fut fait. Ils s’arrêtèrent donc au coucher du soleil; ils étaient à
dix-huit kilomètres de Nitrie. Antoine expliqua à son ami que cette
distance était bonne, car elle permettait la solitude tout en donnant
aussi la possibilité aux moines de recevoir la visite de ceux de Nitrie
après le repas.
Cet équilibre entre solitude
et communauté est essentiel
dans la vie anachorétique des Cellules.
Les kellia (Cellules) se trouvèrent donc
ainsi établies à soixante-cinq kilomètres au sud-est d’Alexandrie, à
l’entrée du désert de Libye. A quelle époque cette fondation fut-elle
faite? Par la Vie d’Antoine nous savons que celui-ci quitta deux
fois son ermitage proche de la Mer Rouge. Cette visite à Amoun dut avoir
lieu lors d’un de ces deux voyages, et aux dires des spécialistes, ce
fut en juillet 338.
2. IMPLANTATION
A Nitrie, il y avait des maisons monastiques
et l’on était de plus en plus les uns sur les autres. Aussi, aux Cellules,
on va construire des cellules individuelles éloignées les unes des autres
de telle sorte que les moines ne puissent ni se voir distinctement pour
se reconnaître, ni s’entendre. La géographie du désert en cette région
y aide puisque celui-ci est légèrement vallonné. Plus le nombre des
moines va s’accroître, plus la superficie va s’étendre... si bien que
les derniers arrivés (ils seront six cents moines au temps de Pallade)
habitent parfois à cinq ou six kilomètres de l’église, laquelle église
était probablement construite au centre du site.
3. L’HABITAT
Quelques solitaires vont s’établir dans
des grottes, des tombeaux ou des édifices en ruine, mais l’immense majorité
va se construire une cellule. Cet habitat individuel du
moine va s’appeler le monasterium. La cellule se situe dans une
cour fermée, bordée d’un mur. Dans cette cour se trouve un puits pour
l’eau potable que l’on trouve à cinq ou six mètres de profondeur. On
y trouve aussi un jardin où l’on peut cultiver légumes, salades et fruits.
La superficie de cette cour est telle que le moine peut s’y promener
sans sortir de son ermitage. La cellule elle-même est construite en
briques (mélange de sable et argile), briques cuites pour l’extérieur,
briques crues pour les cloisons intérieures. Ces cellules sont le plus
souvent carrées (très rarement circulaires), voûtées pour bien protéger
de la chaleur, et munies d’une petite fenêtre par pièce pour l’éclairage.
A l’époque et dans cette région on savait très bien construire de telle
sorte que l’air soit naturellement conditionné à l’intérieur des pièces.
La porte d’entrée est munie d’un verrou pour se protéger des voleurs
qui ne manquent jamais. Si j’évoque des cloisons, c’est dire qu’il y
avait plusieurs pièces dans une cellule! En effet, le plus généralement
deux salles constituent ce monastère, l’une à l’est sert d’oratoire,
l’autre pour le travail, l’alimentation et le sommeil.. mais la cellule
peut avoir plus de deux pièces : un magasin, une chambre pour le disciple.
Avec le temps le nombre de pièces augmentera; on trouvera des cellules
qui auront jusqu’à sept ou huit pièces!...La taille des cellules? Pas
très grande en général. Par ascèse, certains moines ont de très petites
cellules.
Lorsqu’un nouveau frère arrive, tout le
monde se met à bâtir sa cellule; les uns apportent les briques, les
autres l’eau, et la cellule est construite dans la journée.
Le mobilier est sobre : une natte posée
sur le sol en guise de table, une botte de roseau comme oreiller et
très exceptionnellement, un lit. Dans les fouilles récentes on a trouvé
un lit en brique et maçonné; probablement un moine malade habitait-il
là. Le lit est constitué d’une couche végétale ou bien il est creusé
dans le sol. Mais généralement les moines dorment étendus sur une natte
ou assis par terre, adossés contre le mur qui gardera longtemps la trace
du corps.
4. LES VETEMENTS
Ils sont grossiers et misérables; souvent
ce sont des loques. Quelques anachorètes vont vivre complètement nus;
ils sont l’exception et doivent vivre à l’écart de manière à ce que
personne ne puisse apercevoir leur nudité. Dans cette manière de vivre,
il convient de voir le sens du retour à la vie paradisiaque. Mais revenons
à ceux qui sont vêtus. L’idéal va être de ne pas se faire remarquer
par son vêtement, aussi convient-il que celui-ci ne soit ni trop beau
ni trop vil. Généralement on a deux tuniques, une pour la semaine et
une pour aller à l’assemblée du week-end; cette dernière est celle de
la "vêture". En effet, devant les exagérations de toutes sortes vis-à-vis
de l’habillement, Patermouthios va proposer un habit monastique. Celui-ci
comporte deux tuniques sans manche, probablement en lin de couleur naturelle,
une cuculle (capuche), une sorte de pelisse en peau ou en fourrure,
que l’on va appeler une mélote, une ceinture et un bâton. On reçoit
l’habit d’un ancien.
On ne se coupe pas les cheveux, ni on
ne se rase la barbe, d’ailleurs certains vivent dans une ascèse tellement
rigoureuse, tel Macaire d’Alexandrie, que la barbe ne pousse même pas!
On marche pieds-nus.
5. LA NOURRITURE
Certains anachorètes vont vivre sans prendre
de nourriture terrestre, mais en se nourrissant uniquement de l’eucharistie.
Ils restent l’exception. Beaucoup vont jeûner, parfois quarante jours
(chiffre symbolique) de suite; ce sera la limite. Très souvent ils jeûnent
plusieurs jours, s’exerçant peu à peu à réduire leur estomac. Toutefois,
la "voie royale" du désert c’est de manger peu tous les jours.
Que mange-t-on? Des galettes de pain, quelques légumes verts ou à gousses,
des salades, des fruits. Mais un seul anachorète ne mange pas de tout
cela! S’il mange des légumes crus (on les fait très rarement cuire...
même les lentilles et les pois-chiches) il ne mange pas de pain. On
ajoute un peu de sel et d’huile.
Ce régime est tellement rigoureux, malgré
les dérogations pour les malades, que peu à peu certains vont se mettre
à faire un peu, puis beaucoup, de cuisine. Dans des ermitages du VIe
siècle, on a retrouvé des fourneaux et des fours. Une tentation continuelle
dans la vie monastique, quels que soient les lieux, les formes, les
époques, sera de glisser vers moins d’ascèse.
On se nourrit, donc, mais aussi on boit.
Là encore la discrétion est de mise : on ne se gorge jamais d’eau...
parce que les démons fréquentent les endroits où il y a de l’eau. De
plus, boire trop d’eau donne des cauchemars la nuit dit-on au désert.
En conclusion,
La Règle d’or est ceci : Prendre
ce qu’il faut pour nourrir le corps mais pas assez pour l’assouvir.
Autrement dit, rester toujours sur sa
faim, ceci quelle que soit la fréquence et la qualité des repas, et
la quantité de boisson.
6. LE TRAVAIL DU
MOINE
Le moine travaille pour manger (même s’il
mange très peu!), pour nourrir ceux qui ne peuvent plus travailler,
et pour chasser l’acédie. La plupart des moines font de la vannerie
: corbeilles, cordes et aussi des filets pour la pêche et la chasse.
D’autres moines font la moisson pour alimenter la boulangerie de Nitrie
qui fait le pain pour Nitrie, les Kellia et Scété. D’autres moines,
enfin, sont copistes (ils sont rares car la plupart des anachorètes
sont illettrés). Ils ont alors à leur disposition en cellule du papyrus,
un calame et de l’encre.
7. LA PRIERE DU
MOINE
La prière du moine tend à devenir continuelle
(Luc 18,1; 1Th. 5,17). Pendant le travail l’anachorète récite à mi-voix
des versets de psaumes qu’il a appris par coeur. Cela va donner naissance
à "la prière de Jésus" dont je vous parlerai ultérieurement. Le moine
prie aussi dans sa cellule. Il récite "la petite synaxe" : psalmodie
que l’on dit debout, face au Christ en majesté qui est généralement
peint dans une niche située à l’orient de la cellule. Dans nombre de
cellules, on a retrouvé, scellée dans le sol au centre de la pièce de
prière, une dalle de pierre. Cette dalle indique probablement l’endroit
où se tenait l’orant.
8. LE SOMMEIL DU
MOINE
Le moine du désert dort peu... ou pas
du tout (par moments!). S’il dort, cela ne dure pas plus de quatre heures
et cela se passe sur le sol nu ou sur une natte ou assis en essayant
de ne pas appuyer son dos contre le mur! Dès qu’il se réveille, même
en pleine nuit, il prie. "Il allume la ferveur de son âme"; il psalmodie.
S’il a du mal à se lever, il s’impose des restrictions alimentaires
pour y remédier.
9. LE MOINE GARDE
LA CELLULE
Pour les égyptiens, qui sont habitués
à vivre dehors, à l’air, la cellule est une prison. Jean Kolobos dit
que le moine qui reste dans sa cellule avec le souvenir constant de
Dieu réalise la parole du Seigneur : "J’étais en prison et vous m’avez
visité ". Mais le moine est un prisonnier volontaire!
La garde de la cellule assure l’hésychia
(la paix du coeur), la solitude, le recueillement. "Vivre dans l’hésychia"
est synonyme de "rester assis dans sa cellule". Le moine y reste, ainsi
reclus, toute la semaine. Mais il peut aller visiter un autre anachorète,
par exemple un Ancien, pour recevoir un conseil, ou un frère malade
pour le secourir. Il prend alors sa mélote et son bâton. Néanmoins,
il tend à garder la cellule à tout prix. La tentation la plus subtile
contre la cellule est de se dire que l’on va aller voir un Ancien (et
donc sortir de sa propre cellule) pour lui dire qu’on a la tentation
de sortir de sa cellule!
10. LES VISITES
D’après ce qui nous est relaté dans les
apophtegmes, on peut regrouper les visites sous trois catégories :
- Les visites entre moines. C’est
habituellement le jeune qui se rend chez son Ancien. On ne se rend pas
visite entre jeunes frères. On va aussi visiter un frère pour lui rendre
service, le soigner, etc...
- Les visites des gens du monde
(Les "parloirs" si vous voulez!). On trouve là deux genres de visiteurs
: ceux qui viennent faire du troc avec les moines (les démarcheurs!)
d’une part et les personnages importants d’autre part. Ces derniers
ne reçoivent jamais un accueil empressé. On raconte qu’Abba Simon, apprenant
la venue d’un visiteur de marque partit (pour le fuir) soigner un palmier.
Quand le visiteur arriva avec sa suite, il lui cria : "Vieillard, où
est l’anachorète?" Abba Simon répondit : "Il n’y a pas d’anachorète
ici!". Ceci pour vous dire qu’au désert, on fuit les parloirs.
Les femmes sont parfois bien accueillies.
Ce fut le cas de Paula qui vint au désert avec Jérôme et de Mélanie
qui se rendit avec Rufin à Nitrie où elle séjourna six mois à l’hôtellerie.
Elle visitait le vieil Abba Pambo qui, sentant la mort venir, la fit
appeler et lui donna la corbeille qu’il était en train de tresser. Mais
nous parlerons ultérieurement des femmes qui sont allé mener la vie
anachorétique dans ce grand désert.
Parmi les visiteurs, on rencontre aussi
des prêtres païens, toujours bien reçus, et des hérétiques.. pas toujours
très bien reçus.
- Les visiteurs indésirables. Ce
sont les voleurs, les brigands, les assassins.. Pour vous montrer la
vertu des moines envers de tels visiteurs, je vais vous raconter une
petite histoire : "Un Ancien surprend des brigands en train de piller
sa cellule. Il leur dit simplement : <dépêchez-vous avant que le
frère ne revienne>".
Vous voyez, une journée du moine aux Cellules
se passe à prier, travailler, manger, se taire, méditer, parfois visiter
son Ancien, dormir. Mais je voudrais vous parler maintenant de la véritable
activité du moine au désert : la vie intérieure.
11. LA VIE INTERIEURE
"Reste dans ta cellule et pleure tes
péchés".
. Le souvenir des péchés commis
est important : "Plus l’homme s’approche de Dieu, plus il se
voit pécheur" disait Abba Matoës.
. La garde du coeur : la lutte
contre les pensées mauvaises ou vaines. Si l’on ne rejette pas tout
de suite une pensée mauvaise, elle s’installera en nous et il sera impossible
de la déloger : "le moine qui arrive au désert est délivré de trois
combats : celui de l’ouïe, celui des lèvres et celui de la vue; il n’en
a plus qu’un : celui du coeur". Le travail du moine, c’est de voir
venir de loin les pensées. Un apophtegme décrit bien la lutte contre
les pensées : "Les mauvaises pensées sont comme des souris qui pénètrent
dans une maison. Si on les tue une par une dès qu’elles entrent, on
n’a pas de mal. Mais si on les laisse se multiplier, on aura beaucoup
de peine à les exterminer." On fait donc l’examen de conscience
avant de sortir de sa cellule et avant d’y revenir.
. Le recours à Dieu. La prière
est le bouclier qui protège et la lance avec laquelle on attaque l’ennemi.
. Enfin, trésor de la vie intérieure :
le blâme de soi en toutes circonstances.
12 .LA RELATION
MAITRE-DISCIPLE
Je voudrais simplement vous présenter
ici cette relation dans le contexte de la vie au désert.
. On s’initie auprès d’un Ancien. Celui-ci
commence par rebuter l’arrivant pour essayer de le décourager. Si le
nouveau venu persévère, l’Ancien le recevra comme disciple.
. Le rythme de la visite à l’Ancien :
là comme ailleurs, il n’y a pas de règle. Le plus souvent on s’y rend
tous les trois ans.., parfois chaque année. Mais les cas particuliers
sont possibles et l’on peut aller voir l’Ancien, à chaque fois que c’est
nécessaire. Certains jeunes frères s’y rendront deux fois par mois ou
même plusieurs fois par jour en cas de tentation du démon dont on n’arrive
pas à se libérer. Mais la tentation la plus fréquente, dans ce domaine,
va être de ne pas aller voir l’Ancien. Ìl arrive aussi, comme je vous
le disais précédemment, qu’aller visiter son Ancien soit une bonne occasion
de quitter sa cellule et la solitude.
Pendant la visite, l’Ancien ne donne pas
d’ordre. Il dit "fais ce que tu me vois faire". Autrement dit la pratique
est plus importante que la parole.
Les monastères coptes d’aujourd’hui sont
toujours sous cette forme de vie : agglomération de disciples autour
d’un ou de plusieurs Anciens : c’est la vie anachorétique.
13.
UN WEEK-END AUX CELLULES : LA SYNAXE
La grande sortie du moine, c’est la synaxe
(l’assemblée) qui se tient à l’église. Cette église, centre de la communauté,
est construite en briques avec un toit voûté. Elle est constituée de
plusieurs pièces, chacune ayant sa destination précise : salle pour
l’Eucharistie, réfectoire, magasin pour les roseaux, magasin pour le
pain, salle de conférences, et une prison pour enfermer les moines fous.
L’église n’est ouverte qu’en fin de semaine, c’est-à-dire que le reste
du temps elle est fermée à clé. Un jour, les anachorètes étaient là,
réunis pour la prière devant l’église dont on avait perdu la clé de
la porte! Evagre, d’un signe de croix sur le verrou, ouvrit l’église.
Tout le monde se rend à l’église le samedi après-midi. Si l’on est absent,
c’est que l’on est malade ou mort. Un frère remarquera alors l’absence
et ira visiter le frère, le soignera ou l’inhumera. Quelques moines,
mais c’est l’exception, vivent une anachorèse stricte et ne se rendent
pas à l’église en fin de semaine.
Cette synaxe du samedi soir est, pour
tous les ermites, le moment de la vie commune : équilibre entre solitude
et communauté, vie solitaire et vie solidaire, très caractéristique
du monachisme de Nitrie, des Kellia et de Scété. C’est la manifestation
du lien de charité qui unit les moines entre eux.
La réunion du samedi soir commence par
le repas pris en commun, l’agape, qui précédait l’Eucharistie.
Ce repas a lieu au réfectoire; il est en effet interdit de manger dans
une église. Ce repas est plus soigné que celui pris par les moines en
semaine dans leur cellule; ils sont priés de déroger à leur ascèse habituelle.
On rompt le jeûne. On sert aux frères de la nourriture cuite, légumes
et bouillies, des fruits et même du vin. Un jour, un frère déclara devant
tout le monde : "Je ne mange rien de cuit, mais seulement du sel". L’un
des anciens lui dit : "Il aurait mieux valu pour toi manger de la viande
dans ta cellule que de prononcer une telle parole!". Le repas se prend
en silence. Un jour, quelqu’un se mit à rire... Jean Kolobos (un Ancien)
en pleura.
On a très peu de détails sur la célébration
de l’Eucharistie qui a lieu pendant la nuit. D’après quelques apophtegmes,
on sait que les moines se tenaient assis sur leurs bottes de papyrus
et voyaient bien ce qui se passait à l’autel. Par ascèse, Abba Arsène
se mettait derrière un pilier, exprès, pour que personne ne voie son
visage et que lui-même ne puisse en voir un autre.
La liturgie se déroule en deux parties
: la première : chant de psaumes, entrecoupé de lectures de l’Ancien
et du Nouveau Testament; la deuxième : l’action de grâces. Après la
fraction du Pain, les moines quittent leur place, par rang d’ancienneté,
et s’avancent vers l’autel pour communier au corps et au sang du Christ.
Parfois, il était donné à un Ancien de voir les anges intervenir pendant
la distribution de la communion, donnant eux-mêmes les aliments sacrés
à des moines d’une sainteté éminente. Un prêtre, Eulogios, avait le
don de discerner l’état d’âme de chacun des communiants; quand il voyait
l’un d’eux dans de mauvaises dispositions, il le privait de la communion.
Macaire d’Alexandrie raconte que pendant la liturgie, il voyait des
démons venir tenter les moines, mettant leurs doigts à la bouche de
certains, ce qui les faisait bâiller, ou sur les paupières de certains
autres, ce qui les faisait dormir!
Quant aux moines qui ne viennent pas à
l’église, les reclus, ils recevaient la nourriture eucharistique soit
par un ange, soit par un prêtre qui venait de temps en temps chez eux.
Ainsi, Abba Jean a reçu l’eucharistie d’un ange chaque dimanche; c’était
sa seule nourriture. Abba Marc, lui, a vécu trente ans sans quitter
sa cellule. Un prêtre venait célébrer l’eucharistie chez lui.
Je voudrais, à cette occasion, vous dire
quelques mots des prêtres. Il y en avait très peu parmi les moines.
Par humilité ceux-ci refusaient l’ordination sacerdotale. Ils la fuyaient
aussi pour ne pas être arrachés à leur désert. Et je voudrais souligner
ici quelque chose d’essentiel : le mouvement monastique est un mouvement
de laïcs.
"Beaucoup de moines font tout ce qu’ils
peuvent pour échapper à l’ordination, non par mépris du sacerdoce mais
au contraire parce qu’ils étaient pénétrés de sa grandeur et s’en jugeaient
indignes. Isaac, lorsqu’on voulut l’ordonner prêtre, s’enfuit et se
cacha dans un champ. Poursuivi, il fut découvert par un âne qui alla
paître auprès de lui. Même une fois ordonnés, certains prêtres ou diacres
ne voulurent jamais exercer leur ministère. Etait ordonné l’Ancien qui
était reconnu digne du sacerdoce en raison de ses vertus et de sa sainteté.
Le prêtre n’avait pas seulement une fonction liturgique; il jouait souvent
le rôle de supérieur, présidant le conseil des anciens et prenant les
décisions importantes. C’est lui qui décidait de l’acceptation des nouvelles
recrues et leur donnait l’habit. C’est lui aussi qui enlevait cet habit
aux moines indignes avant de les expulser". (Dom Regnault).
Mais revenons à notre week-end! Le dimanche
avaient lieu les conférences et les entretiens. Les égyptiens
ont toujours aimé échanger leurs réflexions sur les sujets les plus
divers au cours de longs palabres; ceci explique que les anachorètes,
seuls toute la semaine, aimaient échanger, le samedi et le dimanche,
sur des sujets spirituels, sur la vie au désert, les observances, la
lutte contre le démon, etc... Les thèmes abordés dans les apophtegmes
faisaient l’objet de ces palabres. Autrement dit, vous avez dans les
apophtegmes le contenu des rencontres de fin de semaine aux Cellules
et à Scété!
A la sortie de l’eucharistie ou de l’agape,
on faisait cercle autour d’un Ancien et des frères l’interrogeaient,
ou bien l’ancien posait une question et demandait l’avis de chacun.
Parfois, par humilité, l’un ou l’autre répondait : "je ne sais pas",
ou se taisait complètement; ou bien encore l’Ancien faisait une action
bizarre qui intriguait tous les autres, puis il en donnait le sens.
Quand on discutait, l’Ancien clôturait par une parole de sagesse; mais
parfois des contestataires et des orgueilleux faisaient front à l’Ancien.
Il arrivait aussi que l’un ou l’autre frère s’endorme... Cassien raconte
qu’un frère qui ne dormait jamais pendant les conférences, s’assoupissait
dès que commençait un discours malveillant sur le prochain. Lorsqu’une
discussion s’envenimait, l’Ancien pouvait se retirer pour ne pas perdre
sa paix et son recueillement.
C’était aussi à ce moment-là que l’on
pouvait avouer ses mauvaises pensées, ou des fautes commises, ou bien
même, c’était l’Ancien qui lisait dans les coeurs et dévoilait les pensées
mauvaises ou usait d’un habile procédé pour amener un frère à avouer
sa faute....
Lorsque c’était nécessaire, ce temps était
aussi celui du Conseil, de l’assemblée extraordinaire. On décidait
là des peines et pénitences à donner aux frères qui ont failli. Certains
frères refusent de siéger à ce Conseil : se sentant pécheurs eux-mêmes,
ils ne veulent pas juger leurs frères. Ces réunions spéciales n’ont
pas lieu toutes les semaines, elles sont occasionnelles.
A la fin de l’après-midi, à l’issue de
ces rencontres et conférences, chacun prend sa provision de pain, de
roseaux, de sel, de tout ce dont il a besoin pour la semaine et repart
dans son monasterium.
14. L’ORGANISATION
CANONIQUE DES KELLIA
Il n’y a ni règle écrite ni horaire, que
ce soit pour la vie en cellule ou pour la vie communautaire. L’organisation,
si l’on peut employer ce mot, est fondée sur la tradition orale.
Pour les cas graves, le prêtre peut réunir le conseil des Anciens. Les
économes s’occupent de la vie matérielle de la communauté. Par exemple,
ils répartissent les dons reçus des visiteurs, s’occupent du ravitaillement
en pain et de tout ce qui est nécessaire pour le travail. Ils assurent
aussi la vente des corbeilles fabriquées.
15. QUELQUES GRANDES
PERSONNALITÉS DES CELLULES
Mort en 394, Macaire d’Alexandrie a passé
cinquante-neuf ans aux Cellules dans une soif de mortifications peu
commune. Pallade rapporte nombre de récits hauts en couleur sur les
prouesses ascétiques de Macaire qui ne pouvait entendre parler d’une
forme d’ascèse sans vouloir en battre le record.
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HOMONYMIE....
MACAIRE...
Ce Macaire est à ne pas confondre avec
Macaire le Grand, appelé aussi Macaire l’égyptien qui était établi à
Scété, ni avec le
pseudo-Macaire, l’auteur des homélies
spirituelles attribuées à Macaire le grand . Sous ce nom d’emprunt cet
auteur inconnu, messalien, du Ve siècle, a pu faire passer son message
spirituel dans l’Eglise.
... L’intellectuel des Cellules! (345-399).
Né à Ibora, dans la province du Pont (d’où son surnom de "Pontique"),
Evagre fut ordonné lecteur par Basile. Après la mort de ce dernier,
il s’attacha à Grégoire de Nazianze qui l’ordonna diacre et qu’Evagre
considéra toujours comme son maître. Grégoire lui apprit en effet la
philosophie et la théologie.
En 381, lorsque Grégoire de Nazianze quitte
le siège patriarcal, Evagre reste à Constantinople avec le successeur,
Nectaire, et se fait remarquer par son habileté dans les discussions
avec les hérétiques. Et voilà que survient dans sa vie privée un événement
qui va bouleverser son orientation. Très brillant, Evagre côtoie les
plus hauts personnages de la cour impériale. Il reçoit des honneurs
partout, et voilà qu’il s’éprend de la femme d’un haut fonctionnaire.
Il réalise alors les dangers et les tentations de la vie. A la suite
d’un songe il quitte Constantinople pour échapper aux dangers de toutes
espèces auxquels l’exposait cette passion. Ce départ fut pour lui la
première phase d’une conversion à la vie ascétique. Il gagne Jérusalem
où il est accueilli par sainte Mélanie l’Ancienne et par Rufin. Mélanie
l’engage à embrasser la vie monastique et à se rendre dans le grand
désert d’Egypte. C’est ainsi qu’Evagre passe deux ans à Nitrie, puis
quatorze ans dans le désert des Cellules où il se livre à l’ascétisme
le plus rigoureux, domptant sa chair par le jeûne et de rudes mortifications,
exerçant le métier de copiste "car, écrit Pallade, il écrivait très
bien les caractères d’oxynorhinque". Evagre est le compilateur des sentences
des premiers maîtres de vie ascétique et il composera lui-même de nombreuses
sentences et centuries (sentences groupées par cent) : courts passages
bien frappés, visant à la concision, facilitant la tâche de la mémoire
et permettant ainsi à tout le monde - même aux analphabètes - de ruminer
ces perles monastiques. Mais vous savez, au milieu de ce peuple de moines
illettrés, Evagre fait vraiment figure d’intellectuel; il tranche sur
l’ordinaire et vous trouverez nombre d’apophtegmes dans lesquels on
le rappelle à la modestie, ou bien on l’amène à reconnaître que toute
la philosophie qu’il a trouvée dans les livres n’est rien auprès des
vertus que les égyptiens, dans leur rusticité, ont acquises par l’ascèse.
Ces réserves s’expliquent par le fait qu’Evagre appartenait à un petit
groupe de moines origénistes, mal vus de l’ensemble des anachorètes.
De plus il sera toujours considéré comme un étranger. Avant que ne se
lève la querelle origéniste, Evagre était tellement estimé de l’évêque
Théophile d’Alexandrie que celui-ci voulut l’ordonner évêque. Mais Evagre
refusa. Il meurt à cinquante-quatre ans, en 399, dans le désert.
Evagre est un auteur très fécond. Les
moines d’Orient comme d’Occident ont étudié ses écrits et l’on va retrouver
sa doctrine spirituelle dans toute la tradition. Il va avoir un rayonnement
extraordinaire, mais, condamné comme origéniste au Ve concile oecuménique,
les grecs ne pouvaient plus le reconnaître. On a brûlé une partie de
ses écrits. Cependant, pour ne pas renoncer à ceux de ses ouvrages qu’ils
tenaient à conserver, ils durent les camoufler et les firent passer
sous d’autres noms, principalement sous celui de Nil.
Evagre est un témoin de la spiritualité
du désert. Il s’est fait, dans toute son oeuvre, témoin de l’enseignement
que se transmettaient, de maître à disciple, les solitaires égyptiens
et qui nous est surtout connu par les apophtegmes. Lui-même se réfère
aux paroles des Pères ou à l’enseignement de tel ou tel d’entre eux.
Sa doctrine de la xénythia (s’expatrier = fuir le monde) et de
l’hésychia (la vie en solitude dans la paix intérieure) est en
fait celle du milieu monastique dans lequel il a vécu. Dans sa démonologie
(il est très fort là-dessus!) une grande part est faite à l’expérience
et à l’enseignement pratique des moines du désert. Mais Evagre a su
incorporer les éléments de cette doctrine toute empirique dans un ensemble
de spéculations empruntées à la tradition philosophique et théologique
et tout à fait étrangères à l’esprit des solitaires égyptiens. Il a
ainsi constitué un système personnel. Evagre vise à donner un enseignement
selon la mesure de chacun. Chaque sentence est faite pour être méditée
pour elle-même. Elle prend souvent un tour énigmatique de manière à
mieux stimuler la méditation et aussi de façon à ne pas exposer trop
brutalement une vérité devant des esprits qui ne peuvent pas encore
la comprendre "toute crue". Vous trouvez là des traces fortes de "discrétion"
que l’on rencontre dans toute la tradition monastique.
La théologie spirituelle d’Evagre
peut schématiquement se considérer ainsi : première étape : la pratique,
deuxième étape : la théorie (= la contemplation). La pratique,
c’est la lutte contre les pensées qui assaillent, les passions, pour
atteindre l’apatheia (la maîtrise des passions). Evagre connaît bien
les passions, il les analyse et lance ainsi la doctrine des huit vices
capitaux qui deviendra celle des sept péchés capitaux et à laquelle
Cassien, Jean de Damas, Grégoire le Grand, attacheront une grande importance.
Au terme de la pratique s’épanouit la charité, l’agapè, fille de l’apatheia.
Alors commence la vie gnostique qui s’achève dans ce qu’Evagre appelle
la théologie. Ce que l’intellect peut voir ici-bas, c’est "le lieu de
Dieu", "la lumière sans forme" qui se lève en lui à l’heure de la prière.
Cette lumière, Evagre la nomme tantôt "lumière de l’intellect", tantôt
"lumière de la sainte Trinité".
Cette doctrine ascétique et mystique s’insère
dans un système métaphysique et théologique assez particulier qu’Evagre
expose dans sa Lettre à Mélanie et, bien sûr, dans les Centuries
gnostiques. Mais vous étudierez cela plus tard si vous vous spécialisez
dans la théologie d’Orient.
La théologie d’Evagre a eu une influence
importante sur la théologie postérieure, influence décisive sur la formation
de la doctrine ascétique chrétienne chez les latins via Cassien; chez
les grecs tels les Pères neptiques (les Veilleurs), Maxime le Confesseur,
Jean Climaque, etc...; chez les syriens qui vénèrent Evagre comme le
grand Docteur mystique, en particulier les nestoriens, notamment Isaac
de Ninive (VIIe s), Joseph Hazzaya (VIIIe s) et Jean Bar Kaldoun (Xe
s) pour ne citer que quelques chaînons de cette grande tradition; chez
les arméniens où Evagre jouit d’un très grand prestige. Les versions
syriaques des oeuvres d’Evagre servent à réaliser des versions arabe
et iranienne qui vont porter l’influence de celui-ci jusqu’au coeur
de l’Asie. On possède aussi de nos jours certaines parties des textes
d’Evagre en géorgien et en éthiopien.
Je ne saurais trop vous recommander la
lecture de quelques oeuvres d’Evagre tel son Traité sur l’oraison,
un petit joyau un peu difficile d’accès mais plein de perles précieuses.
Ce sont de courtes maximes, bien frappées, présentées en cent cinquante-trois
petits chapitres, sur la prière. Pourquoi cent cinquante-trois? Parce
qu’il y a eu cent cinquante-trois poissons péchés sur les bords du lac
de Galilée lors de la pêche miraculeuse. Dans le traité Du Moine
vous trouverez des sentences compilées des Pères et maîtres de la vie
monastique; à vous d’en trouver le sens dans la prière à la lumière
du Saint- Esprit.
Je vous raconterai simplement à son sujet
le fait suivant, trouvé dans les paroles des pères arméniens : Isaac,
prêtre du désert des Cellules, avait d’abord été disciple de Cronius
puis de Théodore de Phermé. Or, aucun des deux ne lui avait jamais rien
dit, et même, ils le servaient au lieu de se laisser servir par lui.
Averti par des Anciens de l’étonnement qu’en éprouvait Isaac, Théodore
avait répondu "Suis-je un supérieur de cénobites? Non, je ne lui dis
rien, mais s’il veut, qu’il fasse, lui aussi ce qu’il me voit faire".
Vous voyez, les Pères pensaient que leur rôle était d’annoncer l’Evangile
d’abord par leur vie et leur silence.
Pallade fut disciple d’Evagre. Il mit
par écrit la vie des moines qu’il connut dans le grand désert et son
livre l’Histoire Lausiaque, nous est très précieux pour la connaissance
de l’histoire du monachisme égyptien. Cet ouvrage fut composé à la demande
et à la destination du chambellan Lausus - d’où le titre de ce livre.
En effet, Pallade, moine d’Egypte de 388 à 400, avait été ordonné évêque
d’Hélénopolis, en Asie Mineure (Bityinie) en 400. Ami de Jean Chrysostome,
il est accusé d’origénisme par Jérôme et exilé en Haute Egypte. Menant
la vie monastique à nouveau, au mont des Oliviers, à Bethléem et en
Thébaïde, il retrouve un siège épiscopal en Galatie avant l’an 420.
Son livre vise à retracer "les observances
excellentes et la conduite admirable des saints et bienheureux Pères,
ceux-là qui prirent sur eux le joug du monachisme et fuirent au désert".
Pallade parle donc de moines et de gens du désert. Il
est le premier auteur connu à employer le terme PERES DU DESERT.
16. QUE SONT DEVENUES
LES KELLIA?
Deux scissions successives vont mettre
fin à la vie anachorétique dans le grand désert des Kellia. La division
est le grand ennemi du moine, homme d’unité par définition.
Des moines anthropomorphes prenaient le
texte de la Genèse 3,1 "Faisons l’homme à notre image" à la lettre
et s’imaginaient que Dieu avait un visage humain. Evagre et les moines
cultivés, dans l’esprit d’Origène, s’élèvent contre cette doctrine grossière,
défendent l’immatérialité de Dieu et affirment avec force que la prière
pure, la vraie prière, ne doit comporter aucune représentation du divin,
si sublime soit-elle. Un conflit éclate donc entre les moines anthropomorphes
(installés principalement à Scété) et les moines origénistes (vivant
principalement aux Cellules).
Tout le désert des Cellules acquiert une
mauvaise réputation auprès des moines de Scété à tel point qu’un jour
deux moines des Cellules arrivent chez Abba Achillas à Scété. Quand
celui-ci leur demande d’où ils viennent, les deux anachorètes n’osent
pas dire qu’ils viennent des Cellules. Ils répondent : "de Nitrie" (mensonge
pas trop grave, les Cellules étant une extension de Nitrie, mais tout
de même...). C’est vous dire que la situation se dégrade.
Par ailleurs, l’archevêque d’Alexandrie,
Théophile, homme très mal commode, oncle de Cyrille qui n’aura pas meilleur
caractère..., avait d’abord condamné l’anthropomorphisme. Mais, influencé,
il fait volte-face et condamne les moines origénistes. On est en 399.
Evagre vient de mourir. En 400 Théophile organise une véritable expédition
contre les moines origénistes. Il regroupe une bande de brigands et
d’individus peu recommandables qu’il envoie piller et incendier les
Kellia. Vous voyez, on n’y va pas par quatre chemins. Tout brûle. Trois
cents moines parviennent néanmoins soit à se cacher dans des puits ou
autre refuge, soit à gagner Constantinople où ils trouvent refuge auprès
de l’évêque Jean Chrysostome.
Quelques années plus tard, les survivants
peuvent regagner les Kellia. C’est le cas d’Isaac, dont nous avons parlé
précédemment. A son retour Isaac fait construire aux Cellules une hôtellerie
pour les étrangers de passage, et un hôpital pour accueillir les moines
malades.
Au Ve siècle, autre scission : le schisme
monophysite, conséquence de ceux qui n’acceptent pas les décisions conciliaires
de Chalcédoine. Aux Kellia, comme ailleurs, il y a division: certains
moines suivent le patriarche d’Alexandrie, Dioscore et deviennent monophysites,
d’autres restent fidèles à la Grande Eglise, chalcédonienne. Cette divison
entraîne la construction d’une deuxième église aux Kellia.
Dès la seconde moitié du Ve siècle, à
cause de l’insécurité due aux pillards et aux nomades qui détruisent
les cellules et menacent les moines, les anachorètes sont obligés de
quitter leurs ermitages isolés et de construire des groupes d’ermitages,
bâtiments protégés par des murailles, chaque moine continuant d’y mener
sa vie solitaire.
L’Histoire des Patriarches d’Alexandrie
nous apprend que les monastères des Cellules furent détruits à l’époque
du patriarche Damien (578-604). Le patriarche Benjamin, contemporain
de la conquête arabe (640) les a fait reconstruire. Dans ce même ouvrage,
on lit qu’il y avait aux Cellules et à Scété des moines schismatiques,
monophysites qui étaient revenus s’installer là. Au VIIIe siècle l’évêque
Jean de Saïs les ramène à l’orthodoxie et les rebaptise après qu’ils
aient abjuré. Au IXe siècle, on apprend par un géographe arabe que le
site est abandonné, mais les édifices sont encore debout.
Au XVe siècle, le site, toujours abandonné,
est enseveli dans les sables...... Il faudra alors le XXe siècle pour
commencer déblaiements et fouilles et voir refleurir la vie anachorétique
au Ouadi Natroum.