Introduction aux sacrements
Selon la confession de foi orthodoxe « le sacrement est
une action sainte en laquelle, sous le signe visible, l'invisible
grâce de Dieu est communiquée au croyant ».
Au
nombre de sept, les sacrements occupent une place centrale dans le
culte chrétien. Les Grecs et les Coptes les appellent «
Mystères».
De
même que l'union du visible et de l'invisible est inhérente
à la nature même de l'Eglise, il y a dans chaque sacrement
un signe extérieur et une grâce spirituelle.
Dans
le sacrement du baptême, l'Eglise utilise des éléments
matériels, l'eau et l'huile, et en fait un véhicule
de l'Esprit.
Introduction au baptême
Authentique serment d'appartenance au Christ, le baptême est
selon St Athanase « la grande et bienheureuse profession
de foi à la Trinité », qui célèbre
la naissance de l'être à la lumière divine.
Il est véritablement « fête des lumières
» (St Grégoire de Nazianze), illumination, parousie-avènement,
« bain d'éternité ».
Les Pères et Saints de l'Eglise n'ont jamais d'expressions
assez belles pour désigner ce sacrement qui nous incorpore
à l'Eglise-Royaume et nous fait naître à la Vie
surnaturelle.
Premier mystère sacré, le baptême signifie «plongeon».
L'Eglise
Copte Orthodoxe, comme toute l'Orthodoxie, a conservé dans
son rite la parfaite signification de ce terme.
Selon
la pratique ancienne, en effet, le prêtre plonge trois fois
le néophyte dans l'eau baptismale, au nom de l'Unique et Sainte
Trinité, et il en sortira re-né dans l'Esprit.
La
triple immersion fait passer par la descente aux enfers, l'ensevelissement
mystique ; l'émersion est le retour vers le jour sans déclin,
la vie-résurrection avec le Christ (Romains, VI, 4-5 ; Colossiens,
ll, 12).
Dans le baptême par infusion ou aspersion, le lien étroit
avec la descente aux enfers disparaît totalement.
La nouvelle naissance ou régénération par «
l'eau et par l'Esprit » (Jean, III, 5-7), désigne
l'ensemble de l'initiation chrétienne qui lie en gerbe du salut
les trois mystères sacrés : baptême, chrismation
et eucharistie.
Non
seulement les enfants sont baptisés en bas âge, mais
ils sont aussi confirmés et ils reçoivent la sainte
communion.
La
pratique du pédobaptisme, ainsi que le baptême apostolique
des familles entières (ce qui présuppose que les enfants
sont inclus, cf. 1 Corinthiens, I, 16) se réfère à
la parole du Seigneur « Laissez venir à moi les petits
enfants » (Marc, X, 14).
Exorcisme, onction, imposition des mains
Dans l'Eglise Copte Orthodoxe, le rite du baptême débute
par les prières de purification, d'absolution et d'onction
sur la mère du futur baptisé, quarante jours après
la naissance d'un garçon, et quatre-vingts jours après
la naissance d'une fille, selon la loi de Moïse (Lévitique,
XII, 1-5 et Luc, Il, 22-24).
L'exorcisme
se fait au nom dg la Sainte Trinité, sous forme d'onctions
sur le front, la poitrine, les mains et le dos du néophyte,
« afin que cette huile anéantisse toute opposition
de l'adversaire » et rappelle l'onction du corps de Jésus
le préparant à sa sépulture.
L'imposition
des mains est accompagnée d'une prière demandant «
que le corps soit libéré de tous les démons
et de toutes les autres souillures, que toute ténèbre
disparaisse du corps et que toute pensée d'incroyance quitte
l'âme » ; elle est suivie du renoncement au mal et
opère l'acte préliminaire de purification de l'âme.
Le néophyte est ensuite déshabillé : c'est le
rite de la dénudation ou déposition des vêtements,
qui symbolise le retour à l'innocence.
Face à l'Occident, la main droite levée pour mimer la
lutte qu'il aura à soutenir tout au long de sa vie chrétienne,
il déclare « renoncer à Satan, à toutes
ses armées du mal » et à la puissance de
l'ennemi (si c'est un enfant mineur, c'est son père, sa mère
ou son parrain qui parle à sa place).
Le
prêtre souffle alors sur le visage « du mort
», en disant « sors, esprit impur » ; c'est
le souffle de vie, semblable à l'insufflation de vie lors de
la création de l'homme.
Face
à l'Orient, la main droite levée, le néophyte
prononce alors son serment d'attachement à Jésus-Christ,
sa profession de foi à la Sainte Trinité.
«
Détache-le de son passé et renouvelle sa vie. Remplis-le
de la force de ton Saint-Esprit. Qu'il ne soit plus un enfant de la
chair mais un enfant de la Vérité, »
demande à Dieu le prêtre avant d'oindre le néophyte
avec l'huile des catéchumènes sur le coeur, les bras,
la poitrine, le dos et la paume des mains.
« Je te oins avec l'huile d'allégresse, contre toutes
les attaques de Satan, pour te greffer sur l'olivier agréable
dans l'Eglise de Dieu, une, sainte, catholique et apostolique
».
Nouvelle
imposition des mains, accompagnée de la prière suivante
« Rends-le digne, irréprochable et pur afin qu'il
reçoive la lumière, le sceau de ton Christ, les dons
de ton Esprit-Saint, qu'il revête la robe du salut et l'armure
de la foi invincible... Fais de lui une brebis intelligente du saint
troupeau de ton Christ, un membre honorable de ton Église,
un vase sanctifié, un enfant de lumière, un héritier
de ton Royaume ».
Consécration de l'eau baptismale Liturgie
du baptême
Après avoir versé l'huile d'olive vierge, l'huile des
catéchumènes et le Saint Chrême (Myron), dans
l'eau baptismale, en invoquant le nom de la Sainte Trinité,
le prêtre adresse à Dieu cette prière : «
Nous te prions de transformer, de transfigurer, de sanctifier
et de fortifier ton catéchumène... Que par cette
eau et cette huile soient anéanties les puissances du mal ».
Soufflant
alors sur l'eau, le prêtre dit : « Sanctifie cette
eau et cette huile, qu'elles deviennent le bain de la nouvelle naissance,
un vêtement incorruptible, la grâce de la filiation divine
et le renouveau du Saint-Esprit. »
Et
encore : « Que celui qui est baptisé dans cette eau
se dépouille du vieil homme qui est corrompu comme le sont
les passions de l'égarement, qu'il revête l'homme nouveau
et qu'il se renouvelle à l'image de son créateur: que
brille en lui la lumière de la vérité qui vient
du Saint-Esprit, et qu'il obtienne la vie éternelle et la bienheureuse
espérance. »
Le Christ agit par la vertu de l'Esprit qu'il envoie sur terre, ce
qui est souligné par le rôle des prêtres dans l'administration
des sacrements qui traduisent la puissance opérante de l'Eglise.
Ainsi,
Saint Athanase explique : « Le prêtre ne consacre
pas l'eau (du baptême) mais il accomplit seulement le bon service,
duquel il obtient la grâce de Dieu », et Saint Jean
Chrysostome commente: «Ce n'est pas le prêtre qui
baptise, mais Dieu dont l'invisible puissance tient la tête
du baptisé».
Par
l'épiclèse-invocation, l'Esprit s'infuse dans l'eau
baptismale qui devient eau vive, eau génératrice, et
acquiert la puissance de sanctification.
L'Esprit
agit en elle et par elle.
L'eau
baptismale efface la souillure du péché originel et
imprime le sceau indélébile sur l'âme purifiée
prédisposée à la sainteté.
«
C'est lui qui est venu par eau et par sang, Jésus-Christ, non
pas avec l'eau seulement mais avec l'eau et le sang. Et c'est l'Esprit
qui rend témoignage parce que l'Esprit est vérité
» (Epître, 1, Saint Jean, V,6).
L'eau
baptismale prend la valeur sacramentelle du sang purificateur du Christ,
et la Croix se dresse déjà à l'aube de la vie
nouvelle.
«En
vérité, en vérité, je te le dis, à
moins de naître d'eau et d'esprit, nul ne peut entrer au Royaume
de Dieu » (Jean, III, 5).
La
triple immersion dans l'eau du Jourdain l'eau baptismale), au nom
de la Sainte Trinité, est « le bain d'éternité
» qui restaure notre nature adamique sauvée en Christ
par son oeuvre de salut.
De
l'abolition du passé on passe au charismatisme du présent,
de la mort-ensevelissement avec le Christ on passe à la vie-résurrection
avec lui, qui débouche sur le Royaume.
«Dès
que nous sommes baptisés, notre âme purifiée par
l'Esprit est plus resplendissante que le soleil, et non seulement
nous contemplons la gloire de Dieu, mais nous en recevons encore l'éclat»
(Saint Jean Chrysostome).
«Réfléchissant
comme dans un miroir la gloire du Seigneur, nous nous transformons
en la même image» (2 Corinthiens, III, 18)
«Quiconque
est en Christ est une nouvelle créature» (2 Corinthiens,
V, 17)
Le
baptême ré-imprime en nous l'image divine oblitérée.
Il
reproduit dans la vie de tout néophyte la Passion et la Pâque
du Christ.
Après
le baptême, le célébrant verse de l'eau sur ses
mains au-dessus du baptistère et récite une prière
afin que l'eau baptismale soit ramenée à sa forme première
et retourne à la terre.
La
connexion des deux sacrements étant très ancienne, la
chrismation, sacrement qui nous donne l'abondance des dons du Saint
Esprit, suit immédiatement le baptême.
Après
la chrismation donc, que nous développerons dans un prochain
article, le baptisé revêt une tunique blanche, le vêtement
de la vie éternelle et incorruptible ; on lui met alors en
bandoulière un ruban rouge ou tricolore, le « zennar
», qui symbolise l'homme nouveau et on lui ceint les reins:
il est ainsi prêt à affronter le combat chrétien
(« le bon combat »).
Après
le chant AXIOS qui signifie : « il est revêtu de dignité...
le chrétien... » ou « elle est revêtue
de dignité... la chrétienne... », consensus
du peuple accompagnant tout acte sacramentel qui mène immédiatement
à l'eucharistie, le baptisé reçoit la communion,
quel que soit son âge.
Lorsqu'il
s'agit d'un enfant, le nouveau baptisé est porté ensuite
en procession dans les bras de sa mère ou d'un diacre autour
de l'église, accompagné du clergé en vêtements
liturgiques, des diacres en aube portant des cierges, des chantres
rythmant les mélodies sur le triangle et les cymbales et chantant
joyeusement «AXIOS».
Bibliographie
La liturgie des sacrements du Baptême et de la Confirmation,
traduite du copte en français par Cyrille SALIB, moine du monastère
de St Antoine le Grand, imprimerie El Kateb El-Arabi, le Caire, 1968.
«
Church Sacraments », par le père Tadros. MALATY, in The
Orthodox Concept, St George Coptic Orthodox Church of Sporting, Alexandria,
1982.
L'Orthodoxie,
de Paul EVDOKIMOV, Bibliothèque Théologique, Ed. Delachaux
et Niestlé, Neuchâtel (Suisse), 1965. Diffusion en France
Delachaux et Niestlé, 32, rue de Grenelle, Paris Vlle.