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LES DESERTS D'EGYPTE

les premiers monastères au pays des pharaons

LE MONDE DE LA BIBLE
NUMERO 116 - Janvier - Février 1999
BAYARD PRESSE


EDITORIAL

Dans les plus anciennes traditions bibliques du peuple au désert, ce lieu est l'espace du désir et de l'épreuve, en même temps que celui du don de la vie et de la Loi.

Du désert, notre mémoire religieuse n' a souvent gardé qu'une vision délicieuse et mélancolique, très éloignée de l' espace ambivalent des premiers ermitages, notre fascination contemporaine pour le désert ayant plutôt appauvri la diversité des représentations forgées par le monde antique.

Une autre énigme: on ne trouvera dans aucun texte de la Bible la proposition explicite du renoncement et de la vie au désert.

Il faut alors distinguer les sources littéraires, bibliques -principalement élaborées par Philon d'Alexandrie sous l'influence d'idées hellénistiques- des représentations héritées des Égyptiens et des anciens Sémites.

Ceux que l'on a appelés, dès le Ve siècle, les Pères du Désert se référaient non seulement à la mémoire et au passé d'Israël, aux représentations des temps eschatologiques, mais étaient les héritiers d'autres traditions.

L'Égypte devint ainsi une terre de prédilection du monachisme.

Dès le IVe siècle apparaissent d'importants ensembles monastiques chrétiens dans les déserts de Scété (aujourd'hui le Ouadi Natroun), de Nitrie, des Kellia...

Parmi ces premiers moines, de nombreux Égyptiens du terroir, des paysans nés dans les villages de la vallée du Nil ou du Delta. Pour retrouver leur conception originale du désert, nous devons affronter une sorte de feuilleté de significations culturelles, religieuses, et d'expériences humaines.

La multiplication des vocations érémitiques (dérivé du grec " erêmos ", désert), dans des oasis au milieu du désert égyptien, se fait sous l' empreinte de l' étonnante civilisation pharaonique.

Cette greffe, en quelque sorte, du message chrétien sur la culture ancienne de l'Égypte a permis la fécondation, précisément, d'idées et de pratiques nouvelles.

Or le désert des Pharaons n'est pas une réalité unique mais le lieu paradoxal, intense, où se projettent les tensions, les peurs intimes et collectives, tous les désirs.

C'est un espace mouvant, complexe, à la fois effrayant et attirant, vide et hanté, peuplé de divinités, de démons.

Espace de dénuement et de trésors cachés.

De véritables expéditions sont menées pour creuser ses montagnes rocailleuses et extirper les richesses indispensables à la gloire des dieux et des princes: pierres précieuses, métaux et matériaux de construction.

Se risquer ml désert, c' est donc parfois entreprendre la quête d'un trésor.

On élève des tombeaux, des temples à des divinités inquiétantes mais adorées, respectées.

Le désert est bien le domaine des morts, mais les vivants s'y aventurent régulièrement pour communiquer avec eux.

Prières, invocations, malédictions. . .

Espace de peur et de répulsion où l'on chasse les proscrits, les indésirables, le désert apparaît du même coup comme le lieu d'une évasion possible, d'une libération, voire d'une initiation.

Dans les plus anciennes traditions bibliques du peuple au désert, ce lieu est l'espace du désir et de l' épreuve, en même temps que celui du don de la vie et de la Loi. Lieu des représentations spirituelles et anthropologiques d'un véritable " roman de formation " du peuple de l' Alliance, le désert a été ce creuset des désirs et des peurs de différentes traditions, sans lesquelles on ne peut entendre l' appel des Pères à suivre le Christ au désert.

Frédéric Boyer, rédacteur en chef




SOMMAIRE DU N° 116
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Le Monde de la Bible. - Paris : Bayard-Presse - Bimestriel.


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