SAINT ISIDORE de PELUSE
Moine et Prêtre en Egypte
4 février / 17 février

 

Isidore fut pour ses contemporains un véritable Père de l’Eglise.

Né à Grania (1), c’est du moins l’opinion la plus probable, il était apparenté aux patriarches Théophile et Cyrille.

Son éducation fut l’objet des soins les plus éclairés ; il sut en profiter, excella dans les sciences humaines et divines, devint très éloquent, brilla dans la philosophie et occupa même une chaire de rhéteur.

Ses écrits témoignent d’une très haute culture d’esprit, et ne le cèdent en rien à ce que nous a laissé de mieux son cousin, le patriarche Cyrille.

En pleine jeunesse, il dit courageusement adieu au monde, renonça à ses richesses, brisa sa carrière et se retira dans les environs de Péluse (2) pour y embrasser la vie monastique.

De là, il rayonna comme un phare éclatant sur l’Egypte entière et même sur l’Orient.

Son temps, entrecoupé de prières, fut consacré tout entier à la composition d’ouvrages et à une immense correspondance. Il écrivit plus de dix mille lettres (3), ce fut son oeuvre de zèle ; par là, il ramenait les pécheurs dans les sentiers de la vertu, confirmait les justes dans le bien, réprimandait les obstinés et conseillait très utilement les prêtres, les évêques, les empereurs eux-mêmes.

Il prit ouvertement le parti et la défense de St Jean Chrysostome sous l’épiscopat de Théophile, loua ses ouvrages et surtout son Traité du Sacerdoce, au risque d’encourir les foudres de l’irascible patriarche.

Il fit près de St Cyrille, qui le regardait comme un père, tout ce qui dépendait de lui pour qu’il l’inscrivit comme saint dans les Dyptiques (4) sacrés.

Ses lettres étaient très brèves, mais pleines de choses ; ce n’est qu’en passant, et par manière de prétérition, qu’il assène quelque coup sur les hérésies de son temps : Zozime (5) est « un bipède nuisible », Eustathe (6) et Eusèbe (7) sont « les fardeaux qui oppressent la terre ».

En vrai disciple de St Jean Chrysostome, il est tout entier à la correction des moeurs ; il ne cesse d’anathématiser le vice. C’est ce qui explique les mille embûches qui lui furent tendues et la haine qui, sa vie durant, n’a cessé de le poursuivre.

Dans ses lettres, peu de citations des auteurs profanes, mais les textes de l’Ecriture y abondent ; elles se terminent généralement par une exhortation pressante : elles furent pour le savant Baronius (8) une mine qu’il mit à large contribution pour la rédaction de ses Annales.

Il eut pour principaux correspondants les empereurs et le haut clergé.

De ce dernier citons Hermogène, évêque de Rhinocolure, Abraham, évêque d’Ostracine (9), Lampérius, de Casium (10), Strategius, évêque d’Attibodos (11), Alipius, évêque de Selles (12), tous cinq de la province Augustamnique (13) ; Macaire, évêque de Métélys (14) et Théopemptus, évêque de Cabase, avaient avec lui un échange continuel de lettres, ainsi que Héraclidès, évêque d’Héraclée en Arcadie (15) et Evoption, évêque de Ptolémaïs (16) ; ces augustes prélats prirent tous part au Concile d’Ephèse (431).

A la mort de Cyrille, l’opinion publique le réclamait pour le siège patriarcal d’Alexandrie ; mais il déjoua les plans les plus secrètement concertés ; il s’enfuit nuitamment de son monastère et gagna le mont Phermé (17) dans les solitudes de Scété, où il resta sourd à tous les appels du clergé et du peuple ; on finit par faire silence autour de lui.

Là, consacré tout entier au service de Dieu, il s’adonna jour et nuit à l’oraison et ne tarda pas à contracter une grave maladie dont il mourut vers l’an 449.

d’après Paul Cheneau, d’Orléans
Les Saints d’Egypte
Jérusalem Couvent des RR. PP. Franciscains 1923


Auteurs à consulter :
- Ses propres lettres
- Photius, Cod. 228, 232. Bibliothèque du Droit Canonique
- Baronius (1538-1607) Annales, sparsim.

(1) - Ne serait-ce pas Kom-el-Khariâna aux environs de Fayoum ?
(2) - Péluse, appelée par les Anciens Péromi, c’est-à-dire village de boue. Elle était la clé de l’Egypte. L’astronome Ptolémée y vit le jour.
(3) - Il nous en reste deux mille douze, d’un style naturel et élégant. (Migne, P.G., LXXVIII).
(4) - Le mot dyptiques provient de deux termes grecs : deux et pli, et signifie deux tablettes, unies par des charnières et se repliant l’une sur l’autre. Il désigne les registres officiels où l’on inscrivait les noms des évêques, des bienfaiteurs des églises, des fidèles se recommandant aux prières, enfin des personnages élevés sur les autels par la voix populaire ou la décision des évêques, alors suffisantes pour la canonisation.
(5) - Prêtre de Péluse.
(6) - Evêque de Sébaste (350-380), donna dans l’hérésie d’Arius.
(7) - Evêque de Césarée en Palestine (264-328), écrivain écclésiastique et historien grec très sincère. Il jouit de l’amitié de Constantin , mais versa malheureusement dans l’Arianisme. Son ignorance de la langue latine le priva de nombreux matériaux qui lui étaient indispensables pour mener à bien son « Histoire écclésiastique » des commencements de l’Eglise à Licinius, le beau frère de Constantin, empereur de 307 à 324 (Migne, P.G., XIX-XXIV).
(8) - Ecrivain écclésiastique (1538-1607), succéda à St Philippe de Néri comme supérieur de la Congrégation de l’Oratoire, fut cardinal et bibliothécaire du Vatican. Ses Annales forment le meilleur cours d’histoire écclésiastique ; elles se composent de 50 vol. in 4°.
(9) - Aujourd’hui Ouaradeh, entre Casium et Rhinocolure.
(10) - Sur les lagunes de Péluse. « Elle n’a pas d’eau ; le corps du grand Pompée y est enterré et Jupiter de Casium possède un temple » (Strabon XVI, 33). Adrien le visita.
(11) - Boutous, ville et lac du Delta. Hérodote se rendit en pélerinage au temple de la déesse Outo.
(12) - Peut-être Phacuse ou Facous.
(13) - Cette province du diocèse d’Egypte au IVè siècle allait de l’Arabie au Nil avec Péluse comme capitale.
(14) - Appelée Fouah près de l’actuelle Rosette.
(15) - Province du diocèse d’Egypte dans l’empire d’Orient, nommée ainsi par Théodose en l’honneur de son fils Arcadius.
(16) - Ville de la Pentapole de Lybie avec Cyrène, Apollonie, Hespéris et Tenchyra.
(17) - Cette montagne, simple plissement de terrain, se trouvait entre Scété et Nitrie.