Petite
anthologie de
la spiritualité orientale
orthodoxe |
« Digest » La connaissance de Dieu
dans la tradition orientale
Paul Evdokimov
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La
connaissance de Dieu ne relève pas de la connaissance, soit philosophique, soit
théologique. Elle est le mystère de la Révélation divine et relève donc
de l’Expérience directe de celle-ci.
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Selon
Saint Paul, la connaissance de Dieu en tant que Père céleste est l’acte gratuit
de la Révélation.
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La
tradition patristique renonce à toute définition formelle, car Dieu est au-delà
de toute parole humaine : « les concepts créent des idoles de
Dieu, l’émerveillement seul saisit quelque chose » (Saint Grégoire de
Nysse).
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« On ne peut voir Dieu et rester vivant ». Cet avertissement biblique
signifie pour les Pères : on ne sait voir Dieu avec la lumière de notre
raison, on ne peut jamais définir Dieu car toute définition est une
« limitation ». Et pourtant, « Il nous est plus intime que
nous-mêmes ».
- Comme le dit Saint Maxime le
Confesseur : « Dieu a déposé dans le cœur humain le désir de
Dieu » et, selon Saint Grégoire de Nysse : « L’homme
porte en lui-même une certaine mesure de connaissance de Dieu ».
- Evagre précise bien la
différence des niveaux et de leur hiérarchie : « L’intelligence
réside dans le cœur, la pensée dans le cerveau ». Le cœur, centre
inétendu, est le siège de l’intelligence dans le sens de l’Esprit – noŭs.
- L’intellect, une fois réuni,
recueilli dans le cœur, signifie l’unification de l’être tout entier, esprit,
âme et corps, appelé intégralement à la connaissance illuminante et à l’amour
unitif.
- La foi orthodoxe ne se
définit jamais en terme d’adhésion intellectuelle, mais relève de la métanoïa,
du noŭs, de l’esprit, de son revirement par l’évidence et la certitude
vécues dans une certaine et paradoxale « sensation du transcendant ».
- … « Mystique », à
l’opposé de toute théologie cérébrale, signifie « théologie du
mystère », qu’on ne connaît que par révélation du côté de Dieu, et par
participation réceptive du côté de l’homme.
- Théologie vivante :
tout en comportant l’élément d’enseignement, la théologie apparaît avant tout
et dans son aspiration même comme la voie expérimentale de l’union avec Dieu.
- « L’homme parfait est
tout entier possédé du Saint-Esprit, c’est la gnose supérieure, de laquelle
vient l’aptitude à la fonction de théologien » (Saint Siméon le
Théologien).
- « Un théologien est
enseigné de Dieu » (Saint Maraire).
- « C’est l’Esprit Saint
qui d’un érudit fait un théologien » (Saint Siméon).
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…
L’Esprit Saint instruit dans la sagesse les illettrés, de pêcheurs il fait des
théologiens (Office de la Pentecôte).
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C’est
toute la tradition mystique de la « Prière de Jésus », conçue comme
eucharistie intérieure de la présence de Dieu. Nommer, c’est rendre présent.
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« La vraie théologie libère des passions » (Saint Basile).
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Pour
tout théologien, ce n’est pas le chemin qui est impossible, c’est l’impossible
qui est le chemin.
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Mais
tout apprenti en théologie doit trembler devant ce ministère charismatique
afin de toucher au Saint de Dieu.
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« Les concepts créent des idoles de Dieu, l’étonnement seul saisit
quelque chose. Les mystères simples se révèlent au-delà de toute connaissance,
au-delà même de l’inconnaissance, dans la ténèbre plus que lumineuse du
silence » (Saint Grégoire de Nysse).
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Trouver
Dieu consiste à le chercher sans cesse… C’est là vraiment voir Dieu que de
n’être jamais rassasié de le désirer.
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Il
est « l’éternellement cherché » (Saint Grégoire de Nysse), on ne le
trouve qu’en le cherchant toujours.
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L’apophase,
en tant que méthode, enseigne l’attitude correcte de tout théologien :
l’homme ne spécule pas, mais se change.
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Selon
la Bible, l’âme vivifie le corps, le fait « âme vivante », et
l’esprit « pneumatise » le tout de l’être humain. Le corporel et le
psychique existent l’un dans l’autre, chacun dirigé par ses propres lois. Le
spirituel n’est pas la troisième sphère, mais le principe de qualification qui
s’exprime à travers le psychisme, le charnel et les rend spirituels.
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L’esprit
est ce point avancé qui communique avec l’au-delà et y participe.
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Mes
sentiments, mes pensées, mes actes, ma conscience m’appartiennent, sont miens
et c’est d’eux que j’ai conscience ; mais le moi est au-delà du mien ;
il est transcendant à ses propres manifestations. Il ne s’agit pas du moi
empirique, connaissable, mais du moi spirituel qui échappe à toute
investigation. C’est la notion-Limite, centre de la totalité, que Jung appelle
le soi (pas le Soi !).
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« L’Esprit n’engendre aucune volonté qui lui résiste. Il ne
transforme par divinisation que celle qui le veut » (Saint Maxime).
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La
grâce presse sur toute âme en secret, sans jamais la contraindre.
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En
disant le fiat, le oui, je m’identifie à l’être aimé.
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C’est
parce que nous pouvons dire non que notre oui résonne pleinement, car
librement. Il faut donc que ce oui soit enfanté au plus profond de notre être.
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Dieu
ne donne pas des ordres, mais lance des invitations, des appels.
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Chaque
faculté de l’esprit humain reflète l’image (connaissance, liberté, amour,
création) et le tout est centré sur le spirituel, dont le propre est de se
dépasser pour se jeter dans l’océan du divin et y trouver l’apaisement de sa
nostalgie.
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« L’homme a deux ailes pour atteindre le ciel, la liberté et la
grâce »
(Saint Maxime).
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« Pour participer à Dieu, il est indispensable de posséder dans
son être quelque chose de correspondant au participé » (Saint Grégoire de Nysse).
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« Omoousios »
de Saint Athanase : Essence Une en trois hypostases, trinité
consubstantielle et indivisible.
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« Nous connaissons Dieu dans ses énergies, sans nous approcher de
son essence. Car si ses énergies descendent jusqu’à nous, son essence reste
inaccessible » (Saint Basile).
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Les
trois âges de la vie spirituelle : Enfance, les Proverbes -
Jeunesse, l’Ecclésiaste - Maturité, le Cantique des Cantiques. Praktiké
Théoria, Physiké Théoria, Théologia.
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« Pour
rien au monde, ne cherche à percevoir une forme ou une figure au temps de
l’oraison. Efforce-toi de rendre ton intelligence sourde et muette et tu
pourras prier » (Evagre).
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« La psyché est une déformation du noŭs qui s’éloigne de Dieu
et se matérialise » (Origène).
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L’Oraison
pure, « intellection de l’intelligence », opère le retour vers l’état
initial. Le noŭs devient simple, dépouillé même des pensées ; alors
la lumière de la trinité éclate dans l’esprit.
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Les
apophtegmes coptes attribuent à Macaire la tradition de la Prière de Jésus.
Elle n’est pas mentionnée dans les Homélies, mais la notion du cœur est
constamment présente. « Le cœur commande et régit tout le corps. La
grâce s’empare des pâturages du cœur. Ceux qui s’approchent du Seigneur doivent
faire leur prière dans un état de quiétude (Hésychia)… en appliquant leur
attention au Seigneur par l’effort du cœur et la sobriété (nepsis) des
pensées. »
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L’héritage
des anachorètes égyptiens débouche chez Jean Climaque sur la « mémoire de
Jésus » unie au souffle. Le nom de Jésus assimilé à la respiration attire
sa présence au cœur de l’hésychaste.
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C’est
dans ce climat du Sinaï, des déserts, que l’hésychasme byzantin prend ses
origines.
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Denys,
chef incontestable de la mystique chrétienne.
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« La contemplation mystique est une pure vision immatérielle
au-delà du discours, des sens et de l’intelligence. En pénétrant dans la
ténèbre qui est au-delà de l’intelligible, (…) il s’agira d’une cessation
totale de la parole, de la pensée, au terme de laquelle nous serons totalement
muets et pleinement unis à l’ineffable » (Denys).
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Nicéphore
le Solitaire (« Traité de la sobriété et de la garde du
cœur ») : Faire « descendre », poser l’intellect dans le
cœur, signifie rendre consciente et vécue la présence de Jésus dans le cœur.
C’est en « respirant Dieu » que l’homme le retrouve dans son cœur.
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Cette
Prière (du cœur) résonne dans cesse au fond de l’âme, même en dehors de la
volonté et de la conscience ; à la fin, le nom de Jésus résonne de
lui-même et prend le rythme de la respiration ; en quelque sorte il est
« collé » au souffle, même pendant le sommeil : « Je
dors mais mon esprit veille » (cant. 5, 2).
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Hésychasme :
Saint Grégoire le Sinaïte systématise méthode et pratique de la « Prière
de Jésus ».
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La
théologie dans le sens de Pères n’est jamais un système de concepts, mais la
transmission de l’expérience de Dieu et le fruit de l’adoration orante de la
doxologie liturgique et pour cela forcément antinomique.
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Ce
n’est pas celui qui est qui provient de l’essence, mais c’est l’essence qui
provient de « celui qui est ».
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Les
personnes divines se compénétrent mutuellement de façon à ne posséder qu’une
seule énergie, une, mais multiforme dans ses manifestations.
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Un
« père spirituel » n’est pas un maître qui enseigne, mais celui qui
« engendre », à l’image du Père céleste ; c’est un
« sacrement de filiation ».
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La
condition essentielle pour devenir « père spirituel », c’est d’abord
être devenu soi-même « pneumatikos ».
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« Celui qui n’est pas engendré n’est pas capable d’engendrer ses
enfants spirituels » (Saint Siméon).
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Un
« Père » ne dirige pas, il donne l’exemple.
« Digest » Les richesses de l’Orient Chrétien
(collectif)
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Les
Pères du désert nous rappellent qu’il n’y a de chemin de communication que dans
l’humilité et la Kénose, cet abaissement qui consiste à se vider de son ego, y
compris identitaire et confessionnel, pour revêtir Celui qui est la seule vraie
identité du chrétien : le Christ.
La spiritualité du Désert - Enzo Bianchi
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Saint
Antoine et Pacôme étaient théodidactes, enseignés et conduits par le Seigneur
lui-même.
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Antoine
avait cette attitude d’accueil, amoureux de la Parole exigée par Origène. Il
accueillait chaque miette de la Parole sans en rien laisser tomber à terre, pas
même un iota.
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Abba
Hypéréchios disait : « Si un moine prie seulement quand il est en
position pour la prière, il ne prie pas du tout » (NAU 104).
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Il
faut tendre à la prière incessante, à faire devenir prière la vie entière, de
telle sorte que chaque action, chaque pensée, chaque occupation et chaque souci
soient vécus dans la présence du Seigneur.
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La
prière est d’abord nourrie par l’étude amoureuse des Ecritures.
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Fuyant
les paroles nombreuses, qui fatiguent Dieu et dissipent l’Esprit, les Pères
rappellent que « le publicain et le fils prodigue n’ont prononcé que
peu de Paroles et ont été sauvés » (NAU 352).
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Un
moine disait : les prophètes ont écrit les livres des Ecritures, puis sont
venus nos Pères qui les ont mis en pratique. Ceux qui vinrent après eux les ont
appris par cœur, puis est venue la génération présente : elle les a copiés
et les a placés inutilisés dans les embrasures (NAU 228).
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Désormais,
note cet Abba anonyme, on recopie les textes des Ecritures, on les étudie
peut-être, mais on ne les utilise pas pour leur véritable but : la
pratique de la vie.
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« Respirez
toujours le Christ, croyez en Lui, vivez comme si vous deviez mourir chaque
jour » (voir COR 15-31).
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Dans
la prière, il faut toujours recommencer, sans craindre les difficultés, les
tentations, les obscurités qui tendent des pièges sur notre chemin. Mais la
prière doit surtout devenir notre respiration, l’invocation du Seigneur ne doit
plus faire qu’un avec notre souffle vital.
Il est écrit : « Le
Seigneur Dieu insuffla une haleine de vie dans ses narines et l’homme devint un
être vivant » (Gn 2, 7).
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Oui,
il faut toujours respirer le Christ, notre vie.
Les Icônes – Claude Bérard
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Quand
nous nous exposons à la lumière de l’Icône, en approchant notre visage de ce
portrait par excellence, cette exposition et cette vénération nous
« matricient » spirituellement.
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Un
historien a noté combien la représentation de l’Esprit sous forme de Colombe
avait freiné la théologie pneumatique.
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En
ce qui concerne le connaissance de Dieu, la théologie orthodoxe est absolument
apophatique, c’est-à-dire qu’elle professe ne pouvoir parler du Père que par la
négative.
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Certains
Pères, et non des moindres – un Grégoire Palamas par exemple – ont soutenu que
le Christ n’avait jamais changé : seuls les yeux des disciples se seraient
un instant ouverts (et encore !).
Les énergies divines – Michel Stavnou
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Pour
l’Orient chrétien, une théologie n’a de sens et de valeur que dans la mesure où
elle part de l’expérience religieuse du corps ecclésial.
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Le
corps humain joue un rôle important et nécessaire dans la prière (Palamas).
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Voilà
précisément en quoi consiste l’aporie : admettre que Dieu est à la fois
participable et imparticipable.
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« Dieu est tout entier essence et tout entier énergie,
imparticipable dans son essence, mais en même temps participable dans ses
énergies » (Palamas).
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L’énergie
divine est le mode existentiel de Dieu dans lequel Il se manifeste et se
communique.
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Toute
essence… manifeste son essence par son énergie. L’énergie divine c’est Dieu en
tant qu’Il sort de lui-même. Chez Palamas, le terme recouvre d’ailleurs deux
sens : d’une part, c’est le rayonnement de l’essence divine, le
jaillissement de la gloire divine pressenti comme la Shekina, d’autre
part, c’est l’acte, l’opération de Dieu qui agit sans cesse, soutenant et
animant sa création.
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L’énergie
désigne donc à la fois la vie divine communiquée et l’acte qui nous fait don de
celle-ci.
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Palamas
explique que l’énergie est à la fois simple et multiple. Simple par rapport à
Dieu qui en est la source unique, multiple dans es effets par rapport à la
création qui est plurielle dans sa diversité.
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Palamas
a repris les intuitions des Pères et les a formulées en une véritable doctrine
paradoxale de la présence-absence divine. Une doctrine intrinsèquement
cohérente, mais crucifiante pour la raison humaine, ayant pour premier objet de
préserver la vérité en Christ.
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Que
Dieu puisse transcender sa propre essence est évidemment une affirmation
odieuse pour toutes les métaphysiques « rationnelles », aussi absurde
et scandaleuse que d’envisager la venue de Dieu dans la condition des hommes.
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La
source de l’Etre divin n’est pas l’essence divine, mais la personne du Père
qui, éternellement, librement et dans l’amour, engendre son Fils et fait
procéder son Esprit. Ainsi les énergies ne sont pas des émanations
impersonnelles de la divinité en tant qu’essence, mais une présence irradiante
des personnes trinitaires.
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Toute
énergie provient du Père, se communique par le Fils dans l’Esprit.
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« Le Père est l’Amour crucifiant, le Fils est l’Amour crucifié,
l’Esprit Saint est l’Amour triomphant dans la force invincible de la
Croix »
(Philarète).
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« Comme l’Esprit Saint est son ultime dispensateur, l’Energie
divine se trouve souvent assimilée à l’Esprit » (Palamas).
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Le
terme biblique « Esprit » est ambivalent : il désigne, dans les
Evangiles, tantôt la personne même de l’Esprit, tantôt le don de l’Esprit,
c’est-à-dire les énergies répandues comme grâce incréée.
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« La lumière qui de toute éternité baigne la plénitude en soi
parfaite de la vie trinitaire » (W. Lossky, pour qualifier les énergies incréées).
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Il
est temps d’éclairer cette dimension essentielle de la théologie chrétienne
orientale. L’une des clés en est la christologie, une christologie pneumatique
reconnaissant une juste place à l’Esprit Saint comme celui qui inspire le
Christ, et qui repose en lui.
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Depuis
la Pentecôte, les énergies divines sont le contenu vivant de la communion
existentielle au Christ ressuscité, par le don de l’Esprit dans les mystères –
sacrement de l’Eglise, et surtout dans la communion eucharistique.
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La
création concerne le présent et pas seulement le passé.
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Tandis
que le Père est la source de la volonté créatrice, le Fils en tant que Verbe
structure le monde et lui donne son sens, son intelligibilité, portant en lui
les idées-volontés ou raisons d’être (Logoï) des créatures dont il est l’alpha
et l’oméga en tant que Pantocreator (celui qui soutient tout). Quant à
l’Esprit, en tant que Seigneur vivificateur, il amène toutes choses en leur
achèvement.
Orient et Occident – Mgr Kallistos Ware
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« La tradition représente l’esprit critique de l’Eglise » (W. Lersky).
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« La tradition n’est pas une somme de propositions apprises par
cœur, mais une expérience vécue » (Dimitro Stanilovë).
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La
tradition n’est pas simplement une collection de textes écrits il y a
longtemps, mais la vie du Saint Esprit dans l’Eglise aujourd’hui.
Les chemins de l’homme
Monseigneur Jean
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Le
mot noŭs souligne la différence entre l’âme et l’esprit.
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Noŭs
est donc la partie de l’être humain qui est tournée vers Dieu.
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Créé,
Incréé et le rapport entre les deux : il y a Dieu, l’homme et le rapport
de Dieu avec l’homme. Sans cette vision triadique, notre conception de l’homme
et du monde est caduque.
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L’être
humain a corps, âme et esprit. Il y a distinction nette entre l’esprit et
l’âme, et le psychosomatique est un monde réel. Mais il n’y a pas que ces
dualités, il y a la triade corps - âme - esprit. Et le grand et perpétuel
problème est de ne pas confondre le monde psychique avec le monde spirituel.
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Le
corps, lui, est rythmé, autonome, et il exprime mieux la pensée divine que
l’âme. L’âme, elle, est riche en émotions, pensées et actions dynamiques. Sa
caractéristique essentielle est la transformation, la variation perpétuelle.
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L’esprit :
Noŭs, Logos intérieur (car il ne concerne pas les paroles), Pneuma ou
esprit intérieur. Et ces trois éléments n’en font qu’un.
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Le
« repos » n’est pas la somnolence ou la quiétude, il est
« non-agitation ».
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Clément
d’Alexandrie distingue trois réactions dans l’homme :
. le corps qui est
sensation, sentiment,
. l’âme, qui est désir,
. l’esprit, qui est le
noŭs.
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L’esprit
n’est soumis ni au temps, ni à l’espace.
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Pendant
la liturgie, le mémorial du Sacrifice n’est pas un souvenir d’il y a 2000 ans,
mais un saisissement dans le présent, une actualisation de ce qui était dans le
temps mais qui dépasse le temps liturgiquement, comme tout mystère.
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Le
noŭs par sa nature est donc en dehors du temps Chronos.
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Une
des conditions essentielles pour retrouver le noŭs, est d’être dans le
silence, silence des désirs, peines, émotions.
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C’est
dans ce silence et par le silence divin que le noŭs apparaît, car le
silence divin est aussi créateur que la parole divine.
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Toutes
les extériorisations empêchent de retrouver le divin. Il faut donc
s’intérioriser pour trouver le noŭs.
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Le
noŭs vient de Dieu, non pas comme une émanation, une énergie, une
étincelle tombée de Lui, mais dans le silence ou Dieu se retire pour avoir
quelque chose de semblable à Lui.
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Quand
l’homme vit uniquement dans le monde psychique et non spirituel, il peut avoir
des élans de l’âme (pitié, émotion), mais il ne peut s’élever à l’intelligence
de Dieu.
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Le
monde spirituel est créé dans le silence. Si je comprends, je suis dans la
profondeur de ce silence.
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Depuis
la Chute, nous sommes tous des déséquilibrés. Mais qu’est-ce que l’équilibre
humain ? C’est simple ! L’homme doit avoir une conscience claire,
hiérarchique dans les valeurs des trois éléments qui le constituent :
l’esprit, l’âme, le corps, sans confusion et sans séparation.
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Dans
l’homme normal, en dehors du péché, l’esprit s’alimente de, par et en Dieu. Il
est le temple du Saint Esprit.
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Si
l’esprit ne s’alimente pas par Dieu, il se nourrit par l’âme, l’âme par le
corps, et le corps, n’ayant rien, incline vers la destruction, la mort, le
néant. La souffrance est une résultante de ce que le corps n’est pas soutenu
par l’âme.
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Les
passions ne sont donc pas un sentiment puissant, elles existent au contraire
quand l’âme est fascinée par le corps, ou l’esprit fasciné par le psychisme.
Tel est le grand problème. Et alors, le mot apathéia, (apathique, apassionnel)
que l’on trouve chez les Pères, ne consiste pas du tout à être apathique,
indifférent, mais au contraire à ne pas donner la puissance de l’esprit à
l’âme, ni celle de l’âme au corps ; à ne pas détourner la hiérarchie des
structures de l’homme.
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Malheureusement,
nous sommes en état de déséquilibre, et tous les psychologues ou thérapeutes
psy ne peuvent prétendre équilibrer l’homme. Ils font des hommes plus ou moins
sociables, mais le problème de la profondeur n’est pas résolu.
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L’homme
est appelé à aller vers Dieu, à entrer en communication avec Dieu et avec
l’Esprit, et son esprit doit reprendre la place royale dans cette triade esprit
– âme – corps.
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Le
noŭs est naturel à l’homme. L’homme qui, au contraire, n’est pas
pleinement corps, âme, esprit n’est pas complet ; il est diminué.
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L’esprit
est donc en nous, mais nous n’en avons pas conscience. Sa recherche doit
commencer non par l’âme, mais par le corps. Car le corps est plus stable et
nous avons déjà vu que l’une des caractéristiques du noŭs en nous est sa
stabilité.
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La
participation du corps à la prière et à la contemplation est un grand problème
de rythme. La position du cors, les gestes, sont en étroite relation avec les
prises de conscience, et ce problème demeure constant.
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Chaque
geste correspond en effet à une certaine attitude qui permet ensuite de
retrouver consciemment son esprit. La position du corps vient d’abord, et
l’attitude de l’âme ensuite. Ce qui convient au corps, c’est la discipline,
l’ordonnance, la règle, alors que le psychisme ne supporte pas la règle.
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Il
faut trouver le juste équilibre entre les états de tension et de détente. Un
homme trop tendu, en effet, ne peut entrer en soi. Trop détendu, il ne le peut
pas non plus.
-
Pour
la prière, les Pères adoptent la position assise – sauf Saint Siméon, cas
d’exception, qui priait couché.
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A
côté de ce problème de la position du corps, il faut noter celui du
« rachat du temps », de l’importance du silence.
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Prenons
conscience que le corps aide à rentrer dans l’homme complet, car il agit sur le
psychisme : il est le temple de l’Esprit.
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Parce
qu’une des particularités de l’âme, c’est la conquête et la lutte :
souvent nous sommes éprouvés par telle ou telle chose afin que nous luttions
intérieurement.
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La
première et la meilleure chose, c’est d’avoir la possibilité d’arrêter les
pensées. C’est difficile… Pour cela, on conseille d’arrêter les pensées sur un
seul sujet. D’où la Prière de Jésus.
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Dire
« mon âme est abattue » au lieu de « je suis
abattu » : ce ne sont pas mes pensées, mais ce sont des pensées qui
envahissent mon âme.
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Quand
l’homme pleure sur une faute qu’il a accomplie, il pleure le plus souvent sur
son amour-propre.
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Il
ne faut pas confondre intuition et connaissance spirituelle. Dans l’intuition
vous pressentez, vous faites un saut. Dans la connaissance du noŭs, vous
saisissez dans leur totalité, spontanément, le passé et le présent, ce qui
était et ce qui sera.
-
Le
psychique ne peut voir le spirituel, mais le spirituel voit le psychique ;
il voit toutes les souffrances, la tragédie, et il compatit. Car le noŭs
voit spontanément tout transfiguré en splendeur.
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« Si c’est l’Esprit qui vous conduit, vous n’êtes plus sous la
loi »
(Saint Paul).
-
L’inquiétude
est une émotion opposée à la paix intérieure.
Le couple : Accordance – Discordance - Transcendance
Incarnation }
Pâques } Mariage. Devenir couple pour être visité.
Pentecôte }
Couple = Icône de Dieu.
Vocation du couple, vocation mystique, chemin
spirituel.
Capable : capax = porteur d’une grâce.
Charismes masculins :
1.
Cultiver
le bonheur (le jardin d’Eden)
Prendre soin de la vie sous
toutes ses formes.
2.
Garder
la Loi (le permis, le défendu)
La Loi c’est le don de la vie.
La Loi permet de se structurer, de savoir qui je suis.
3.
Le
pouvoir de nommer
Participation de l’homme à
la création : Je ne suis moi-même qu’en engendrant l’autre à sa propre
réalité.
Charismes féminins :
1.
Accueil
2.
Sagesse
3.
Spiritualité.
*
* *
Regard clair sur soi.
Invoquer l’Esprit Saint.
Etre vrai avec moi, être vrai avec l’autre.
Regarder en toute sincérité ce qui fait discordance
dans mon couple. Là où je sens ce qui vient de moi, ce qui vient de l’autre.
Dire : « Là, j’ai mal… » Ne pas dire : « Tu
m’as fais ça ! »… Le « Tu » tue.
Nous sommes tous des enfants blessés, nos parents aussi.
Fragilité de l’identité = manque d’être,, de
responsabilités. Perte d’identité depuis la « Chute » (c’est tous les
jours !).
Se justifier, c’est perdre son identité, ne
pas être responsable. On s’avilit en se justifiant. Nous avons à être juste,
pas à nous justifier !
Jésus : « Venez à moi, vous qui… »
Ce qui me structure, c’est le couple que je vais
voir en face de moi. Image structurante du Père.
« Seigneur, donne-moi la grâce du Pardon »
C’est la reconnaissance de mes blessures qui va me
grandir. Dieu pourra guérir mes blessures. C’est le rôle de la femme de mettre
l’homme au monde.
Devenir pleinement homme, c’est devenir Masculin /
Féminin (équilibre Anima / Animus).
L’amour, c’est dire : « Toi ».
Dénominateur commun : Chasteté, Pauvreté,
Obéissance (humilité, simplicité, respect, présence).
C’est l’Autre qui est le sens de ma vie.
L’amour se suffit à lui-même.
Laisser être l’Autre. Laisser l’Autre être (Je).
Le corps habite la conscience. La conscience est un
océan illimité. Le corps est un microcosme contenant le macrocosme. Avoir
pleinement conscience d’une corps habité est fondamental.
Intelligence sans Amour : c’est démoniaque.
Le contexte est plus important que les textes !
Le texte ne révèle contexte que si on l’apprend « par cœur ». Les
mots en eux-mêmes ne sont pas intéressants.
La Parole biblique réalise ce qu’elle exprime.
« Il me créé à chaque expir » (Ps. 103).
Du par cœur ou par le cœur.
Une « parole » est d’abord une prise de
conscience qui illumine.
Il n’y a que deux réalités : l’amour ou la
peur !
Expérimenter la totale disponibilité. Toute
crispation est un refus.
L’abandon, c’est ce qui permet à Dieu d’être Dieu.
Il faut expérimenter la confiance.
L’ouïe est le principal sens, il contient tous les
sens.
Le corps est totalement impliqué dans l’écoute.
Vraie écoute = abandon (« hospitalité de l’âme).
Dire oui à ce qui est, c’est s’asseoir sur le trône
avec Dieu. Etre totalement un avec ce qui est.
Dieu a une volonté sur nous à laquelle nous ne
prêtons pas attention. Ce que Paolo Coelho appelle « la légende
personnelle ».
L’abandon (Ishoara) est la plus haute réalité parce
qu’alors nous sommes visités par Dieu.
Nous sommes plus ou moins « Pélagien »
(cf. Hérésie de Pélage), nous pensons nous « réaliser » par notre
seul effort ! Alors survient l’Ego, l’orgueil spirituel.
Je suis un être inquiet, viendra un jour la
Confiance.
Il faut sauter, se jeter à l’eau, comme Pierre…
C’est maintenant !
Une œuvre vient de l’Esprit Saint quand il y a la
force et la douceur.
Dieu m’appelle d’une façon très personnelle. Je suis
un être unique dans l’univers, et Dieu m’appelle d’une manière unique.
La prise de conscience, c’est toujours dans
l’instant. Chaque instant de vient communion.
L’homme ne supporte pas le manque de sens. Quand sa
vie manque de sens, il est angoissé.
L’être profond de l’homme, c’est le projet de Dieu
pour lui, c’est ce qu’on appelle la vocation.
C’est l’appel de Dieu qui définit un être, et c’est
la réponse…
La foi demande une participation active, c’est un
combat. Faire tout ce que l’on peut et attendre que Dieu agisse.
Il faut ramasser ses énergies dispersées en un seul
point.
Je suis appelé par mon nom, il me suscite à la vie,
il me connaît (naît en moi). Souffle à la fois physique, psychique, spirituel.
Dieu me connaît par l’inspir (Ps. 139).
Là où je suis, c’est Dieu qui m’envoie.
Etre un envoyé, prendre conscience que je suis.
Dieu vit en moi, Dieu ne cherche plus que moi !
Refuser la dépendance c’est ne vouloir dépendre que
de Dieu.
L’Esprit parle par le sentiment des profondeurs. Ce
qui nous manque, c’est la conscience que nous vivons en Dieu. Nous
sommes des inconscients.
L’Etre est Amour.
L’essence de tout, c’est l’orientation de l’Etre.
Une seule question : Que ferait l’amour si je
le laissais agir ? Que ferait Jésus à ma place ?
La moindre pensée sur Dieu est un obstacle à sa
présence.
Revoir Ps. 139 :
1 à 6 : Présence intime
7 à 12 : Présence universelle
13 à 18 : Présence amoureuse - Je suis une
œuvre d’amour
19 à 22 : Présence totale
23 à 24 : Acceptation de ce qui est
La conquête de l’instant
présent, c’est la voie.
Persévérer parce que le
Démon est éphémère.
Nous sommes tous infestés.
La vraie possession (ça existe !) est devenue rare en Occident.
Il faut jeûner tous les
mercredi et vendredi.
Nous sommes enchaînés par le
monde biologique (animal). Le plus grand jeûne, c’est la sobriété.
Notre nature profonde, c’est
l’Amour !
« L’Amour m’a tissé
dans le sein de ma mère ».
L’adversaire de l’amour, de
la vie (qui est toujours là en moi), c’est :
-
la
volonté de Satan,
-
ma
propre volonté.
Il y a toujours l’Amour de
Dieu qui m’enveloppe.
Nous n’avons pas à
« attendre l’épreuve » : c’est maintenant, l’épreuve, c’est
l’instant présent (épreuve au sens Amoureux de Dieu).
Les moyens de Satan :
le parasitage. C’est un imposteur, il parasite…
Trois tentations :
1.
Manger !
L’homme est ce qu’il mange.
2.
Posséder !
Par Satan ou par Dieu ?… Derrière tout désir il y a le désir de Dieu.
Quand il est possédé par Satan, l’homme est possédé par les choses (maison, voiture, livres, etc.). La vraie possession, c’est moi par « moi ».
3.
Le
pouvoir !
Au bout de la jouissance, la
mort, sans Dieu ! Au bout de la possession, l’absurdité ! Au bout du
pouvoir…
Dans la Bible,
« Malheur à toi » veut dire : malheureux seras-tu.
Mon « moi » est
devenu central. Je suis devenu égocentré, je cherche le plaisir dans les choses
qui deviennent centrales pour moi.
Chasteté (en grec
Sophrosynié) : plénitude de la sagesse !
Lire le Ps. 50 tous les
jours.
Demander la grâce de
l’expérience, de l’exil !
Ne pas réfléchir, il n’y a
rien au bout de la réflexion. Sentir, descendre au fond de la sensation de
l’exil.
Je suis hors de la véritable
vie ! Je « bricole » à la surface de la vie !
Rien de plus stimulant que
de lire la vie des Saints (une ou deux pages) tous les jours.
Ce sentiment d’exil peut
porter aux larmes. Les pleurs atteignent les profondeurs affectives, c’est une
conversion, un retournement, un repentir profond.
Eau des larmes ® Eau du baptême, purification.
Etre là où je suis ! Le
trésor est là, pas ailleurs. C’est la où je me trouve qu’est le royaume.
En langage Biblique, justice
= Sainteté. Dieu de Justice = Dieu d’Amour. Dieu dit : « Ma joie,
c’est ton bonheur ». Comment j’aime Dieu ?
Tout faire avec amour, là
est le secret !
Il faut coûte que coûte que
mon cœur appartienne à Dieu.
Il faut le
dire ! Il faut l’écrire !
Virginité : une seule
direction au lieu du multiple (Voir Ezéchiel 3. 6)
Reconnaître ce qui ne va
pas. Alors le retournement devient possible !
JN 2. 1 à 11 – Noces de Cana
En ce temps-là, il y eut des
noces à Cana de Galilée. La mère de Jésus y était, et Jésus aussi fut invité à
la noce, avec Ses disciples.
Comme ils n’avaient plus de vin (1), la mère
de Jésus Lui dit : « Ils n’ont plus de vin ! » (2)
Jésus lui dit : « Qu’y
a-t-il pour Moi et pour toi, femme ? Mon heure n’est pas encore
venue ! » (3)
Sa mère dit aux serviteurs :
« Quoiqu’Il vous dise, faites-le ! » (4)
Or il y avait là six jarres de
pierre (5),
destinées au rite juif de purification. Chacune pouvait contenir deux ou trois
mesures.
Jésus dit aux serviteurs :
« Remplissez d’eau ces jarres ! » (6) Et ils les remplirent à ras
bord.
Jésus leur dit :
« Prenez maintenant et portez-en à l’ordonnateur du festin (7) ».
Et ils firent ainsi.
L’ordonnateur du festin goûte
l’eau changée en vin (8). Il en ignore la provenance, mais les serviteurs la
connaissent bien. Alors, s’adressant au nouveau marié, il lui dit :
« D’habitude, on sert d’abord le bon vin, puis, quand les invités sont un
peu gais, on apporte le vin ordinaire (9). Mais toi, tu as gardé le bon vin jusqu’à
maintenant ! » (10)
Tel fut le premier des signes que
fit Jésus. C’était à Cana de Galilée et ainsi Il manifesta Sa gloire et Ses
disciples crurent en Lui.
*
* *
(1) Comme ils n’avaient plus
de vin… Ils étaient coupes du Divin, de la source éternelle.
(2) La mère de Jésus Lui
dit : « Ils n’ont plus de vin ! »… Elle intercède pour
nous, pour qu’Il nous délivre.
(3) Jésus lui dit :
« Qu’y a-t-il pour Moi et pour toi, femme ? Mon heure n’est pas
encore venue ! »… Il répond à la femme, il agit en fils de Dieu à
la demande de la Théodokos.
(4) Sa mère dit aux serviteurs
(que nous sommes) : « Quoiqu’Il vous dise, faites-le ! »…
Première des disciples, elle agit en totale confiance, sans aucun doute,
dans une oblation totale.
(5) … Six jarres de pierre…
Symbole du quotidien, des six jours de la Création ; de pierre, symbole de
mon cœur de pierre.
(6) « Remplissez
d’eau ces jarres ! »… Purification de mon cœur, début de ma
métanoïa, ouverture ; si j’obéis, je deviens coupe capable de recevoir
l’enseignement « à ras bord », totalement, sans retenue !
(7) Jésus leur dit :
« Prenez maintenant et portez-en à l’ordonnateur du festin »…
Rendre grâce à Dieu, oser se présenter devant Lui.
(8) … L’eau changée en vin…
Symbole de mon éveil, de ma transformation, de mon adhésion, de ma communion.
(9) … Le vin ordinaire… Les
idoles, les fausses lois, les sacrifices inutiles.
(10) … Le bon vin jusqu’à maintenant ! … Symbole de
l’alliance nouvelle.
Approches de la Prière de Jésus
Evêque Ignace Briantchaninov
La prière orale et vocale dite avec attention est le
commencement et la cause de l’oraison mentale ; et alors nous apprendrons
facilement à prier aussi par l’esprit seul dans le silence de notre cellule
intérieure.
Celui qui prie des lèvres et de la voix, mais sans
attention, fait monter sa prière en l’air mais non vers Dieu.
Il ne s’entend pas lui-même, il se laisse entraîner
par des distractions, ses pensées errent au loin dans des préoccupations tout
étrangères à la prière.
Pareille prière dite sans attention est mutilée,
détruite par les distractions.
L’attention doit absolument accompagner la prière.
« La racine de la vie monastique, c’est la
psalmodie » (Saint Isaac le Syrien).
Frères, soyons attentifs pendant les prières orales
et vocales que nous prononçons lors des services à l’église et dans la solitude
de nos cellules.
« Maudit soit celui qui accomplit l’œuvre de
Dieu avec négligence » (Jér. 48, 20).
Nous devons concentrer toute notre activité sur la
prière incessante ; celle-ci conduit en effet le chrétien à un état qui
favorise la venue du Saint-Esprit.
Toutefois, il ne faut pas changer souvent la formule
de la prière, car, comme le remarque Saint Grégoire le Sinaïte, les arbres
souvent transplantés ne prennent pas racine.
Celui qui a repoussé avec dégoût toute forme de
vagabondage mental (de distractions), voit le maître dans la cellule intérieure
de son cœur.
Le fondement de toutes les vertus se trouve dans le
jeûne, dans la veille et dans la vigilance.
Silence et solitude :
Habitue-toi à te taire afin que tu puisses garder l’hésychia
même parmi les gens.
Habitue-toi à la solitude et à l’hésychia.
Plus que tout, aime garder le silence.
Lutte contre la colère :
Prêtons avant tout attention à la colère qui a pour
origine l’orgueil. Pardonnons à nos pères et à nos frères, proches ou
lointains, vivants ou morts, toutes les offenses et toutes les injures qu’ils
nous ont faites, comme si elles n’étaient pas pénibles à supporter.
Refus du dialogue avec les pensées :
Repousse avec résolution tout dialogue avec les
pensées passionnelles et toute rêverie.
Les passions agissent sur le sang :
L’action du sang sur l’âme est tout à fait manifeste
lorsque la passion de colère et les pensées qui lui sont liées agissent sur le
sang, particulièrement chez les gens irascibles.
Dangers de la vanité :
On doit prêter une attention toute particulière à
l’énergie de la vanité.
La maturité est nécessaire :
Quel est l’âge qui convient le mieux pour pratiquer
la prière de l’intellect et du cœur ? C’est l’âge mûr qui est le plus
favorable, quand déjà tout naturellement s’apaisent les excès de la jeunesse,
grâce à l’étude des écrits des saints Pères de l’Eglise orthodoxe d’Orient.
S’examiner soi-même :
Quand un homme entre en lui-même, se connaît
lui-même, reconnaît ses passions, leur action multiforme, ses moyens de lutter
contre elles et sa propre impuissance, plus solides deviennent les fondations
sur lesquelles s’élève l’édifice de sa prière.
L’oraison mentale :
Grâce à l’action bienheureuse du Saint-Esprit dans
l’homme, un silence inhabituel commence à régner en lui.
La place du repentir :
Une profonde affliction est l’inséparable compagnon
de route de la prière du cœur.
Témoignage des Pères :
Aime l’inactivité de l’hésychia plus que de
rassasier les affamés dans le monde. Il vaut mieux pour toi faire la paix avec
ton âme en vue d’établir l’harmonie dans la triade qui se trouve en toi – le
corps, l’âme et l’esprit – que d’apaiser par ton enseignement ceux qui
divergent dans leurs opinions.
La sainte paix est l’immobilité de l’intellect qui
provient de l’accomplissement des commandements de l’Evangile.
Il est évident que l’intellect acquiert cette
immobilité ou absence de vagabondage des pensées (la suppression des
distractions) après son union avec l’âme.
Comment vaincre la colère ? Le Christ répondit
à Païssios le Grand : « Si tu veux vaincre la colère et
l’emportement, ne désire rien, ne hais et ne méprise personne ». Pour
garder la paix de l’âme, il faut écarter de soi l’acédie, selon la parole du
Siracide : « La tristesse en a tué beaucoup, et il n’y a pas
d’utilité en elle » (Sir. 30, 25). Il faut à tout prix éviter de juger
les autres.
Persévère dans les commandements de l’Evangile :
Lutte contre les passions avec patience et
longanimité ; ne tombe pas dans l’acédie et ne perds pas courage ; si
tu tombes, relève-toi ; si tu tombes de nouveau, relève-toi encore.
La coupe de l’impuissance a son utilité, jusqu’à un
certain moment ou la Providence divine permet qu’elle soit présentée à l’ascète
pour le purifier de l’orgueil, de la colère, de la rancune, de la condamnation
des autres, de la superbe et de la vaine gloire. Il est particulièrement
important de dépister en soi l’activité de la vaine gloire, et de la dompter.
On parvient à entrer dans la vie spirituelle par la
victoire sur les passions, l’apatheia donnée par la venue de la paix du
Christ.
Que la prière et la lecture des livres saints
deviennent ta principale occupation ; accorde aux autres affaires une
importance secondaire ; quant aux affaires mondaines, sois indifférent
envers elles et, si tu le peux, ne t’en mêle pas du tout.
Si tu t’enivres, la sainte paix cessera d’œuvrer en
toi. Si tu te mets en colère, son action s’interrompra pour longtemps. Si tu te
permets d’être insolent, elle cessera d’agir. Si tu te permets de te délecter
de pensées voluptueuses, elle t’abandonnera pour longtemps.
Comment lutter :
Ne « théologise » pas. « Si tu
pries vraiment, ont dit les Pères, alors tu es théologien ».
La nuit convient particulièrement bien à la pratique
de la Prière de Jésus grâce au silence et à l’obscurité.
Le nom divin révèle les passions :
Tant que l’homme demeure dans le tourbillon de la
vie, la puissance de Satan passe inaperçue et reste ignorée, maos lorsqu’elle
entend le nom du Seigneur Jésus invoqué par celui qui prie, elle est saisie de
trouble. Elle soulève dans l’homme toutes les passions ; parleur
intermédiaire, elle le plonge tout entier dans une terrible agitation et
produit dans son corps toutes sortes d’étranges maladies.
Lorsqu’en pratiquant la Prière de Jésus, nous
constatons en nous une agitation inhabituelle et un bouillonnement des
passions, ne nous laissons pas vaincre à cause de cela par l’acédie et par la
perplexité. Au contraire, reprenons courage et préparons-nous à l’effort
spirituel, à l’invocation très attentive du Nom du Seigneur Jésus, car en
réalité nous avons reçu le signe évident que la Prière de Jésus a commencé de
produire ses effets.
Ne pas se décourager : au début, cette pratique
apparaît comme extraordinairement aride, on rencontre pour commencer des
ténèbres impénétrables, la dureté et l’insensibilité du cœur. Cette remarque ne
doit pas nous jeter dans l’acédie et dans le découragement.
Quand la prière commence à agir :
La Prière de Jésus agit par degrés successifs :
pour commencer, son action porte seulement sur l’intellect, l’amenant à un état
de silence et d’attention ; puis, elle commence à gagner le cœur.
Ceux qui recherchent avec imprudence les états
élevés de la prière, surtout s’ils sont obstinés et guidés par un esprit de
présomption et d’orgueilleuse suffisance, sont toujours marqués du sceau de
l’exclusion.
Le maître de la prière, c’est Dieu : la vraie
prière est un don de Dieu. C’est Dieu lui-même qui fait peu à peu progresser
dans la prière.
La vigilance spirituelle est le silence du cœur,
elle est l’attention à soi-même, libre de toute pensée.