La
prière humble et secrète
Evêque
de Carthage au milieu du IIIè siècle, Saint Cyprien
est une des figures de l'Eglise primitive. Il subit le martyre sous
la persécution de Valérien le 14 septembre 258.
Vers 25O, il écrit un traité sur la prière,
influencé par Tertullien.
Nous
publions ici un passage sur l'attitude intérieure dans la
prière.
Chez
les hommes qui prient, la parole et la demande doivent être
bien réglées, paisibles et modestes. Pensons que nous
sommes en présence de Dieu. Il faut que le regard divin trouve
plaisir à l' attitude du corps et au ton de la voix. Autant
il est inconvenant de vociférer, autant il convient de prier
avec modestie et réserve. Le Seigneur nous a ordonné
de prier dans le secret, dans des lieux cachés et retirés
et même dans notre chambre. C'est ce qui s'accorde le mieux
avec la foi, car nous devons savoir que Dieu est présent
partout, qu'Il entend et voit tous les hommes, que par la plénitude
de Sa gloire Il pénètre dans ce qu'il y a de secret
et de caché. Ainsi est-il écrit: " Moi, je
suis un Dieu proche, et non un Dieu lointain. Si un ne s'enfonce
dans des retraites, est-ce que Moi, Je ne remplis pas te del et
la terre ? " Et encore: " En tout lieu les regards
de Dieu observent les bons et les méchants ".
Lorsque,
dans l'unité, nous nous rassemblons avec les frères,
et que nous célébrons les sacrifices divins avec le
prêtre de Dieu nous devons rester attentifs à la modestie
et au bon ordre. Nous ne devons pas éparpiller nos prières
en paroles informes ou jeter vers Dieu, avec un bavardage bruyant,
une requête qui devrait être recommandée par
la modestie. Car Dieu écoute non la voix mais le coeur. Et
nous n'avons pas à attirer par nos cris l'attention de Celui
qui voit les pensées. Le Seigneur le prouve quand Il dit:
" Pourquoi ces pensées dans vos coeurs ?"
Et dans un autre passage: " Que toutes les Eglises le sachent;
Moi, Je sonde les reins et les coeurs ".
Au
premier livre des Rois, Anne, qui préfigure l'Eglise, observe
cette règle. Elle n'implorait pas Dieu à grands cris,
mais Le priait en silence et modestement dans le secret de son coeur.
Lorsqu'elle parlait, sa prière était cachée,
mais sa foi était manifeste; elle parlait non des lèvres
mais du coeur, car elle savait que Dieu entend ce langage. C'est
pourquoi elle a obtenu ce qu'elle demandait, car elle suppliait
avec foi. L'Ecriture le montre, lorsqu'elle dit: " Elle
parlait dans son coeur, elle remuait les lèvres, mais on
n'entendait pas sa voix ; et te Seigneur l'exauça ".
De même nous lisons dans les Psaumes: " Partez dans
vos coeurs, et sur vos lits regrettez vos fautes ". Par
Jérémie, le Saint-Esprit nous donne le même
enseignement: " C'est dans notre esprit qu'il faut T'adorer,
Seigneur ".
Celui
qui adore, mes frères bien-aimés, ne doit pas ignorer
comment, dans le Temple, à côté du pharisien
priait le publicain. Il ne levait pas les yeux vers le ciel avec
effronterie, il ne tendait pas les mains avec insolence. Il se frappait
la poitrine, il reconnaissait ses péchés intérieurs
et cachés, il implorait le secours de la divine miséricorde.
Alors que le pharisien se complaisait en lui-même, il obtint
d'être sanctifié de préférence à
celui-ci. Car il priait sans mettre l' espérance de son salut
dans son innocence, puisque personne n' est innocent. Mais il priait
en confessant ses péchés, et sa prière fut
exaucée par Celui qui pardonne aux humbles.
Saint Cyprien de Carthage.
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