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L'ACTION SPIRITUELLE
par

LE PERE MATTA EL MASKINE

père spirituel du Monastère de Saint Macaire

 



SÉRÉNITÉ


Pour l'homme spirituel - l'ascète - qui chemine sur la route de l'indigence, la véritable sérénité est de garder sa vie du vide.

Le repos du corps lie à une dimension temporelle est semblable à l'arrêt de l'heure temporelle et à l'engourdissement qui ressemble au sommeil. Apaisement mensonger, car le temps ne peut pas s'arrêter; il se prolonge et passe furtif, au delà du conscient de l'homme, et, se suivant, les heures, les jours, les mois, et les années sombrent dans le gouffre de la mort ou de la non-existence.

Et subitement, la conscience de l'homme s'éveille pour trouver que le temps s'est allie contre lui avec la mort et le gouffre; et que l'occasion de l'immortel et de la vie éternelle est, pour lui, devenue plus faible qu'elle ne l'était!

Le temps lui-même se déroule dans un immuable équilibre et selon une loi inflexible; il forme à l'intérieur de l'homme des tas harmonieux d'incidents physiologiques et psychologiques qui ne sont que l'expression d'un passé inflationniste et qui ne cesse, chaque jour, de charrier de nouveaux incidents influençant ainsi son comportement, son tempérament, son activité et tous ses mouvements.

La réalité dont on ne peut pas se défaire est que l'homme est une histoire compilée, produite par les jours et qui, en fin de compte, achève de lui donner son aspect humain, non seulement du point de vue de la stature du corps, mais encore de la grandeur de l'âge où s'inscrivent la richesse et la profondeur de la personnalité humaine compte tenu des incidents de parcours et du comportement de l'homme à leur égard.

Mais il se trouve dans l'homme une autre dimension, supra-temporelle et qui en est séparée, elle ne dépend pas des changements physiologiques, n'est pas soumise à l'influence psychologique, elle est presque séparée de la poussière de la terre, de tout ce qui en procède ou y revient.

Cette dimension intemporelle ne s'accorde pas au mouvement du temps car elle n'est pas de ce monde.

Ce pourquoi elle n'a pas d'unité de mesure.

Elle est seulement soumise à la disposition directe de Dieu. C'est la loi de l'immortalité ou de la vie éternelle.

Quand l'homme se conduit selon la dimension temporelle, sa conscience se meut dans la dimension de l'heure et du jour.

Il adhère à la terre, au ciel et à tout ce qu'ils renferment.

Il est soumis à la loi du mouvement et du changement qui nécessairement conduisent à l'anéantissement.

Mais lorsqu'il suit la loi de l'immortalité, il ressent quelque chose de l'infini, de l'existence absolue et de la vie éternelle.

Il adhère à la vérité et se transforme en elle. C'est ce qu'exprime la théologie par l' "Union à la Nature Divine".

Ces deux dimensions: temporelle, intemporelle vont de pair dans l'homme, appelé à vivre selon ces deux dimensions à la fois, soumettant le temps et poursuivant l'immortalité!

Et au tant l'homme se presse de suivre l'une de ces orientations, au tant l'autre s'amenuise et semble rapidement reculer.

L'attachement à la terre et aux objets terrestres quand il atteint le degré de la passion dans le plaisir ou le souci et l'inquiétude hâte la conduite de la vie dans sa dimension temporelle et la soumet, en conséquence, fatalement, à la loi du dépérissement vers le néant qui est celle du temps.

S'attacher à la vérité - et la vérité c'est Dieu - et s'occuper de l'amour et de la vie éternelle jusqu'au don de soi et livrer son âme, c'est la marche accélérée dans la dimension intemporelle et c'est, en conséquence, pratiquer la loi de l'éternité que Dieu gouverne.

Celui qui s'enferme dans la dimension temporelle et use ses forces à y patauger, s'affronte à un vide intérieur; car la vie éternelle s'échappe de ce qu'il y a en lui de plus profond, ou bien s'endurcit comme si elle était un ennemi ayant fait en lui sa demeure!

Celui qui, au contraire, se meut dans la dimension divine, sent le temps s'évader de sa personne et passer derrière lui; ainsi d'un homme voyageant en chemin de fer, qui voit les poteaux et les arbres fuir comme dans l'horreur pour devenir minuscules, jusqu'à disparaître de l'existence du voyageur qui reste stable à sa place, prenant bien son parti de la hâte et de l'anéantissement du décor.

Ainsi le monde entier et tous les objets qui s'y trouvent se replient en quelque sorte, se minimisent et disparaissent derrière celui qui avance sur la route de la vie éternelle.

L'homme qui est loin de Dieu s'affronte soit à un certain sentiment d'arrêt du temps, soit à une certaine insensibilité vis à vis du temps parce qu'il y est plonge!

L'arrêt du temps est un vide meurtrier pour l'esprit destine à passer à travers le temps et aller au-delà.

De même l'homme qui se lie au monde, en lui germe un sentiment enfle du monde, de l'importance et de la grandeur des objets qui y sont disposes.

Car l'homme, en soi, est magnifique dans l'être de sa création et de sa formation; et tout ce qui entre dans le domaine de son attention devient dans sa pensée consciente magnifique, comme dans l'illusion d'une vision trompeuse.

C'est le secret de la divinisation de l'univers et de la matière chez certains physiciens et chez les communistes.

Au contraire, l'homme uni à la vérité, dans sa marche vers l'éternel, reçoit une ample impression du temps qui se détache de lui comme si les jours et les années devenaient petits à ses yeux, perdant de leur valeur à mesure que leur vitesse s'accroît.

Se crée ainsi en lui un sentiment de plénitude car leur fuite rapide rend plus intense en lui le sentiment de prolongement et de son rapprochement du but suréminent.

Pareillement pour l'homme qui vit en Dieu, le monde se dissocie de son intégrité, et les choses et les événements qui s'y produisent paraissent être dans la réalité futiles comme des jouets d'enfants et comme leurs querelles.

Il existe une vraie sérénité et une sérénité trompeuse.

Dans le contexte "dimension temporelle" une halte est un arrêt momentané ou prolonge du labeur de l'homme pendant lequel il reste tranquille et seul.

Ce qui n'engendre pas un vrai repos mais refoule plutôt l'homme dans l'effrayant vide temporel. Car même dans l'arrêt momentané ou dans l'arrêt prolonge du labeur de l'homme, il est impossible de se libérer du mouvement temporel; l'homme y paraîtrait comme marchant sur place!

Ainsi augmente son emportement contre le temps qui devient comme une force qui l'oppresse et le foule de tous les côtés.

L'homme ne peut se libérer du temps que s'il entre en son être profond et s'attache à la vérité et à la vie éternelle, c'est-à-dire s'attache à la dimension intemporelle et croit à l'immortalité.

Il est impossible de trouver le vrai repos par cessation de l'effort corporel car la nature étant esclave du temps, est prête à se venger de toute créature vivante qui a l'audace de s'arrêter de la servir; à moins que la cessation ne soit qu'une détente pour rassembler ses forces et reprendre le service et le labeur d'une façon plus efficace et plus active!

Le temps est toujours contre l'inaction! Or la nature proscrit le repos, en soi.

Le vrai repos implique donc, dans son fond, non la cessation du travail mais une solution apportée au problème du temps comme une issue à sa perplexité et de s'élever au-dessus du statut de la nature et sa nécessité.

Ainsi par rapport à l'homme, repos et inaction deviennent parfaitement clairs dans une conduite conforme à la dimension intemporelle (de l'homme).

C'est-à-dire par l'accès à la vie éternelle et par l'attachement à Dieu, là où le repos n'est pas cessation de l'effort à tout prix, mais détachement (que l'on garde) envers lui.

Là où la passivité ne vient pas de l'effacement du moment de l'heure temporelle dans la conscience mais d'un dépassement du temps.

Tout homme, y compris l'ascète, est sujet à rechercher la sérénité.

Cette tendance si forte à la sérénité vient de la douleur du joug du monde (temps) et de la faiblesse de la chair (mouvement).

C'est pourquoi l'homme est amené comme par force à chercher la sérénité, au plus court chemin; c'est-à-dire en fuyant le temps et en fuyant le mouvement.

Le Messie - béni soit son nom - découvrait ce sentiment dans l'homme.

Il l'a donc invité à la véritable sérénité en acceptant son joug propre, affirmant que son joug est doux et son fardeau léger.

Ce qui ne s'établit pas sur la cessation de l'effort physique ou dans le refuge d'un silence apparent, mais sur le passage à la vie éternelle, passage au-delà du temps.

Or, le cheminement vers la vie éternelle n'abolit pas le temps et n'écarte pas non plus le mouvement.

Mais il s'en sert comme un homme, pour monter, utilise les marches d'un escalier, il reste donc, en tout les cas, devant nous, de l'effort (à produire) et du mouvement (à déployer)!

Or, dans la promesse du Seigneur relative à la sérénité: "Vous trouverez une sérénité pour vos âmes" un fond secret et mystérieux se trouve dans le sens du mot "joug".

Le joug, l'attelage, indique la compagnie du Seigneur, pour nous au cours du cheminement, car le joug n'est pas porté par un seul, il s'attache sur deux cous.

Le savent ceux qui labourent avec la charrue; si un bœuf vigoureux et un bœuf faible s'accompagnent, tout le travail de la charrue sera assumé par le plus fort!

O mystère béni!

Dans la compagnie du Seigneur une sérénité certaine pour nous.

Mais c'est une invitation de sa part, non une audace de la nôtre.

Même le petit effort qui nous reste à accomplir, il s'en charge pour nous.

Voyez-vous, comme le Seigneur est bon!

 


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